[Série bilan 2020] Pour la filière solaire, une année en deux temps

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  • Le Covid-19

Résilience sera le mot de l’année pour le secteur solaire. « Il est probable que nous terminions l’année avec un peu moins de 1 GW de raccordé, chiffre Richard Loyen, délégué général d’Enerplan. Si ces chiffres sont un peu décevants, nous avons tout de même su maintenir une activité du même ordre qu’en 2019. En dépit de la pandémie de Covid-19, nous avons résisté ». Pour les acteurs de la filière, la crise sanitaire a donc été révélatrice de tout le potentiel de la filière solaire. « Le photovoltaïque a montré que quand on lui laisse la place dans le mix électrique, il sait se déployer sans être associé à toutes les catastrophes qu’on lui prête souvent : déstabilisation du réseau, intermittence…, assure Xavier Daval, président de la Commission Solaire du Syndicat des énergies renouvelables (SER). Cela me conforte dans le fait que nous sommes bien les acteurs de demain ».

Du côté des collectivités également, la crise a changé l’attractivité et l’organisation des territoires ruraux. « Ces territoires qui se sentaient souvent comme la cinquième roue du carrosse, ont eu envie de se revaloriser, souligne Guillaume Perrin, Chef adjoint du département énergie à la FNCCR (Fédération nationale des collectivités concédantes et régies). Sur le plan énergétique, cette envie d’attractivité se traduit à la fois dans la rénovation énergétique et sur l’envie de devenir des territoires plus durables et plus agréables à vivre. La structuration du territoire se renforce via les renouvelables, notamment avec le PV, qui est vu comme plus compréhensible, plus visible et génère moins de controverses, moins d’appréciations négatives que d’autres sources d’énergies locales. C’est la raison pour laquelle cette énergie est plus mobilisée par les territoires ruraux ».

Le PV a donc bien tiré son épingle du jeu, avec un niveau d’appréciation de la part à la fois des communes, mais aussi des intercommunalités, des syndicats d’énergie. Les changements à l’issue des municipales ont tiré vers des réalisations. « Cette énergie s’est inscrite dans de nombreux projets, notamment avec la mobilité durable, via les ombrières, notamment dans les grandes villes. Le solaire bénéficie en effet de l’avantage de pouvoir conduire à une action rapide et lisible par rapport aux administrés, à l’occasion du début des nouveaux mandats. La crise sanitaire n’a fait que reporter des projets, il n’y a pas eu d’abandons », poursuit Guillaume Perrin.

  • L’auto-consommation

Parmi les bonnes nouvelles qu’ont apportées cette année, Enerplan se félicite de l’extension prochaine du guichet ouvert pour des projets allant jusqu’à 500 kWc pour les bâtiments et ombrières. « Cette demande que nous soutenions depuis longtemps est enfin actée et devrait entrer en vigueur à partir du 2ème trimestre 2021, rappelle Richard Loyen. Cela va fluidifier le marché du BtoB du 100 au 500 kW et offrir une vraie visibilité pour ces projets ». En particulier avec le décret tertiaire qui impose d’augmenter l’efficacité énergétique des bâtiments, Enerplan y voit le doublé gagnant pour donner du dynamisme à l’autoconsommation des entreprises.

Pour la FNCCR, c’était également l’un des grands thèmes de cette année. « Les territoires sont dans une logique de circuit court, assure Guillaume Perrin. C’est un peu l’idée de « cultiver son potager énergétique local ». Cela se traduit à la fois dans le bois-énergie, mais aussi dans le photovoltaïque.  Il n’est pas question de s’isoler au niveau local, mais de valoriser ce qui existe sur mon territoire, de s’inscrire dans un monde durable… Ce qui conduit à porter un regard neuf sur la rénovation énergétique, sur le photovoltaïque, sur le bois-énergie et sur la méthanisation ».

  • Lourdeurs administratives

Reste que pour le secteur du solaire, en demande d’accélération des projets, notamment pour répondre aux objectifs de la Programmation pluriannuelle de l’énergie qui prévoit de porter la capacité de production d’énergie solaire photovoltaïque à 35,6 à 44,5 GW en 2028, les lourdeurs administratives sont un véritable frein. « Le marché est lesté pour toutes ces lourdeurs et ces délais d’attente, la complexité des demandes de raccordement ou d’autoconsommation », liste Richard Loyen.

  • L’amendement sur la renégociation des tarifs d’achat

Impossible non plus de mentionner dans un bilan 2020 l’amendement sur la renégociation des tarifs d’achats de moins de 250 kW signés avant 2011, vécu comme un coup de poignard par la profession. « A un moment où une partie de l’économie de notre pays va mal, certains hauts fonctionnaires et politiques décident de casser ce qui marche, à savoir la filière solaire, par simple esprit de vengeance », s’insurge Xavier Daval. « Alors que l’on devrait accélérer pour répondre aux objectifs de la PPE, on fragilise au contraire les entreprises », s’attriste pour sa part Richard Loyen. « Dans tous les cas, notre message a toujours été : on a besoin d’un cadre clair et d’une visibilité », abonde dans ce sens Guillaume Perrin.

  • Et pour 2021 ?

Xavier Daval se montre ainsi pessimiste pour le début de l’année et estime que la filière manque de visibilité pour le premier semestre 2021, en raison de l’attente du décret d’application de l’amendement et des cahiers des charges des prochains appels d’offres de la CRE. Pour Richard Loyen, la dynamique des précédents appels d’offres et des projets bâtiments devrait conduire à une accélération du marché avec, il l’espère, plus d’1,5 GW raccordé l’année prochaine. « 2021 devrait également être l’année où l’on va révéler les bonnes convergences entre solaire et électrolyse, avec l’arrivée de nouveaux projets, confie-t-il. De la même manière, nous avons un gros chantier devant nous, celui de la voiture électrique. Recharger les véhicules électriques avec de l’électricité photovoltaïque est un véritable levier de réduction des émissions à effet de serre », assure-t-il.

« 2021 sera intéressant en termes de projets. Il y a ceux qui sont déjà partis, dont ceux qui ont été retardés, mais aussi beaucoup de nouveaux projets, dont les travaux débuteront au deuxième semestre de l’année », pronostique Guillaume Perrin. Pour la FNCCR, côté PV, un sujet demeure, la question des terres agricoles. Mais à la fois l’autoconsommation, avec l’élargissement des possibilités en zones rurales, et l’agrivoltaïsme peuvent faire le lien entre plusieurs usages des terre (ovins, cultures). Même si ce dernier est moins au rendez-vous qu’attendu. La fédération l’assure, elle continuera donc de travailler en faveur de la dynamique sur les cadastres solaires (avec des projets clé-en-main). « On remarque également que, sur le solaire, les collectivités développement de plus en plus de projets globaux, intégrés, avec du PV et de l’hydrogène, avec de la mobilité. Le PV devient un des outils dans les projets, plus la finalité », conclut-il.

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