« Le silicium a une limite physique d’environ 30 % et l’idée du projet était de changer de paradigme pour dépasser ce seuil sur l’efficacité des cellules solaires », explique Laurent Lombez, chercheur CNRS au laboratoire de physique et chimie des nano-objets (LPCNO) à Toulouse dans un entretien avec pv magazine France au sujet du projet ICEMAN qu’il a coordonné.
Financé par l’Agence nationale de la recherche (ANR) à partir de 2019, ce projet a exploré une piste prometteuse qui faisait déjà son chemin dans le monde de la recherche photovoltaïque et notamment à l’IPVF : concevoir des cellules troisième génération, conçues à partir de matériaux III-V pour limite les pertes par thermalisation. Plus précisément les équipes de recherche ont cherché à mettre à profit les propriétés semi-conductrices de ces éléments, pour les transformer en « piles quantiques », afin de convertir la chaleur résiduelle en électricité.
Dans une cellule solaire en silicium classique, seul un tiers de l’énergie est effectivement convertie. Le second tiers correspond à des pertes optiques, liées à une absorption incomplète du spectre lumineux (par réflexion, transmission, …). Le dernier tiers représente des pertes de chaleur. « L’idée était donc de convertir cet excédent de chaleur en tension, par un effet thermo-électrique », résume Laurent Lombez.
Des résultats expérimentaux concluants
Le projet, qui a duré jusqu’à 2024, a permis d’observer et d’étudier ce phénomène. Les résultats ont montré que le mécanisme fonctionne sur des cellules extrêmement fines, grâce aux contribution du centre de nanosciences et de nanotechnologies (C2N), qui a exploré son fonctionnement nanophotonique.
Le principe repose sur le comportements des électrons dits “chauds”, qui conservent une température (une activité électromagnétique) plus élevée que celle de la cellule. En temps normal, ces électrons perdent rapidement leur énergie en chauffant le reste du matériau. L’enjeu du projet était de stabiliser cette situation hors équilibre thermique afin de capter l’énergie sous forme de tension. Le projet a pu mesurer et quantifier le phénomène.
Divers laboratoires ont été impliqués dans les différentes étapes du projet : l’institut Foto de Rennes a travaillé sur la production des échantillons, tandis que celles de Paris et Toulouse (la LPCNO, la C2N et l’IPVF) étaient en charge des mesures et des analyses expérimentales. A Marseille, l’IM2NP a modélisé le comportement des porteurs de charge au sein des cellules.
Une étude à poursuivre pour concrétiser un prototype
« Les résultats ont confirmé le concept et le bien-fondé de la recherche », indique Laurent Lombez. En revanche le projet n’a pas encore abouti à la fabrication d’une cellule mesurable. Il a cependant permis des avancées significatives dans l’observation, la mesure et l’évaluation de l’effet thermo-électrique dans la recherche photovoltaïque.
Des obstacles restent à franchir, notamment en ce qui concerne la mise en oeuvre à moyenne échelle. Car les matériaux III-V ne peuvent, pour le moment, qu’être déployé sur des bases de la même nature, ce qui les rend peu intéressant d’un point de vue coût. « Par rapport au silicium, qui est très très peu cher ces dernières années, il est peu probable que ce type de technologie se générale dans le solaire commercial pour le moment », nuance Laurent Lombez. Des secteurs comme les télécommunications, l’informatique ou l’aérospatial, où le coût est un facteur moins limitant, utilisent déjà abondamment ces éléments, très efficaces en tant que semi-conducteurs.
Malgré les limites rencontrées, le chercheur estime que toutes les briques technologiques sont désormais en place pour poursuivre les travaux. Les équipes françaises engagées dans ICEMAN continuent (hors projet et sur des recherches annexes) à explorer la voie des matériaux III-V et de la conversion thermo-électrique.
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