Alors que le solaire permet des coûts de développement plus faibles, le solaire est déjà et pourrait rester supérieur en termes de développement en Europe, selon un récent papier d’analyse du cabinet Enerdata.
En 2024, l’Union européenne comptait 338 GW de capacité photovoltaïque cumulée, dont environ 220 GW sur toiture, soit près de 65 % du total. Les projets sur bâtiments ont d’ailleurs représenté 60 % des nouvelles capacités solaires installées entre 2020 et 2024.
La France, quant à elle, disposait de 13,5 GW de solaire en toiture produisant environ 14 TWh d’électricité sur l’année. Selon Enerdata, même en ne retenant que des projets économiquement viables avec un seuil de coût de revient maximal à 0,15 €/kWh, la production pourrait atteindre 125 TWh en 2050, soit neuf fois la production actuelle de 14 TWh. Les scénarios les plus ambitieux évoquent jusqu’à 400 TWh/an en toiture.
Le modèle à grande échelle en perte de sa superbe
Les projets à grande échelle au sol présentent l’avantage d’une mise en oeuvre souvent plus rapide et moins coûteuse, avec un LCOE (coût actualisé de l’énergie) moyen pour les grandes centrales tombé à environ 40 euros/MWh en Europe en 2024. Cependant, les coûts unitaires ne baisseront que très peu à partir de 2025 selon les projections d’Enerdata.
Et pour cause : les opportunités d’accès au foncier se font de plus en plus rares et les contraintes liées à la non-artificialisation des sols impactent le développement et la sortie des projets. L’augmentation des interactions, voire de la compétition, avec les activités locales (notamment agricoles et touristiques) et la nature, dans une Europe déjà très dense et qui se veut écologique, est aussi un facteur encore peu intégré dans les coûts aujourd’hui. Il pourrait toutefois l’être de manière croissante demain, notamment avec la mise en place de mesures et d’initiatives sur le partage de la valeur demandée par les collectivités, les citoyens et les agriculteurs.
Les centrales en toiture bénéficient de modes d’amortissement qui peuvent retenir tant les ménages que les entreprises, séduits par une rentabilisation liée à la hausse des prix de l’électricité.
Pour les opérateurs et gestionnaires de réseaux, les projets décentralisés facilitent une adaptation plus fluide et disséminée du développement des infrastructures réseaux. Le solaire en autoconsommation permet de réduire les coûts et les délais associés au renforcement (du moins de la “fluidifier) et d’encourager des usages et modes de consommation qui améliorent l’équilibre local entre offre et demande.
A l’inverse, les projets à grande échelle exigent des aménagements complexes et coûteux du réseau, susceptible de retarder le raccordement des centrales et de fragiliser le réseau. Certains marchés, comme les Pays-Bas, montrent aussi des signes de saturations avec des délais de raccordement pouvant atteindre dix ans et qui freinent particulièrement le développement de projets au sol.
Contraintes techniques, économiques et enjeux politiques
Des contraintes techniques persistent, en particulier en ce qui concerne la capacité portante des bâtiments : en Europe, entre 30 et 40 % des toitures industrielles ne peuvent supporter des panneaux solaires standards sans travaux coûteux – ce qui engagent généralement la non-faisabilité d’un projet.
Si les panneaux légers sont une solution toute trouvée pour ce type de structure, reste que le marché, bien qu’existant sur le papier se montrez insuffisamment exploité, par manque d’incitation politique notamment – une situation illustrée par le cas de Créawatt, fabricant français de panneaux solaires flexibles légers, en redressement judiciaire en attente éventuelle d’un plan de continuation ou de reprise.
Une évolution structurante du modèle économique du solaire en toiture est aussi observée : la filière bascule globalement du “net-metering” (modèle de soutien initial, où le surplus injecté dans le réseau est rémunéré sur un tarif fixe) au “net-billing”, qui rémunère ce surplus au prix spot du marché, plus faibles, mais aussi fluctuants.
Ce changement de paradigme s’inscrit, selon Enerdata, dans une volonté de réaligner les incitations économiques d’un secteur désormais bien lancé et de stimuler le développement du stockage et de la flexibilité énergétique – au risque de réduire la rentabilité des installations si les comportements et les technologiques ne s’adaptent par suffisamment, ou pas suffisamment vite.
La filière française face à ses défis
En France, le solaire en toiture représente environ la moitié des 24 GW de PV installés fin 2024 et continue de se développer malgré la baisse des tarifs d’achat. La Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE), en cours de finalisation, vise une montée en puissance à 100 GW installés en 2050, avec 57% des nouvelles installations en toiture, majoritairement au sein des segments petits et moyens (41%) et grandes toitures industrielles (16%).
Couplée à un contexte politique mouvant marqué par le gel ou la contestation de la PPE, des attaques ciblées sur les obligations de solarisation, et une opposition croissante (en tout cas brandie politiquement à l’extrême droite) à la massification des renouvelables, et une stratégie axée sur le nucléaire à tout prix, la situation pose des enjeux cruciaux pour soutenir la dynamique du solaire en toiture en France.
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