Comment améliorer l’assurabilité des acteurs et des installations photovoltaïques en France

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« La filière est encore jeune et les innovations sont nombreuses, souligne Pascal Chapelon, Président d’agéa, la Fédération des agents généraux d’assurance, parlant du secteur du photovoltaïque. Toutefois, ce dynamisme, signe de bonne santé, est également un des freins majeurs pour assurer efficacement ces installations, les assureurs manquant du recul nécessaire pour mesurer les conséquences sur la sinistralité de ces techniques en perpétuelle évolution ». C’est pourquoi agéa a consacré une étude sectorielle sur l’assurabilité des acteurs et des installations photovoltaïques en France, afin de dresser un portrait actuel de la thématique.

En effet, la Fédération, qui regroupe 15 syndicats de société et 12 chambres régionales, craint que la dynamique de développement du photovoltaïque ne soit « entravé par les difficultés qu’ont les assureurs à évaluer les risques et la sinistralité ». A cela plusieurs raisons, justifie-t-elle. La première concerne la certification technique des procédés et des équipements qui évoluent régulièrement, empêchant donc d’avoir le recul nécessaire pour évaluer les risques.

La garantie décennale

Ainsi, en 2022, la Cour de cassation a estimé que les panneaux photovoltaïques incrustés en toiture devaient être considérés comme des ouvrages au sens de l’article 1792 du Code civil, qui relèvent donc de la garantie décennale des constructeurs. Cependant, « les procédés et les systèmes photovoltaïques relèvent du domaine de la construction non traditionnel, et la grande majorité d’entre eux relèvent de techniques de construction peu reconnues par les acteurs de l’assurance et du bâtiment », note le rapport.

D’autre part, les techniques évoluent en permanence et il existe des solutions très différentes d’un fabricant à l’autre. Ces innovations fréquentent empêchent les assureurs et les acteurs du bâtiment d’avoir un recul suffisant – entre dix et vingt ans – pour les évaluer.

Zoom sur… la jurisprudence de la Cour de cassation du 21 mars 2024

Depuis cet arrêt, la Cour estime que « si les éléments d’équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage, ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, quel que soit le degré de gravité des désordres, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun, non soumise à l’assurance obligatoire des constructeurs ». Suite à cela, les compagnies demandent les avis techniques des panneaux photovoltaïques ainsi que des différents éléments des supports de fixations, complexifiant le parcours de souscription.

Une deuxième raison tient davantage au manque de structuration et de formations des installateurs de panneaux photovoltaïques, « trop courtes et disparates », juge l’agéa. Enfin, troisième raison : si la sinistralité a fortement baissé, elle reste plus élevée sur les bâtiments équipés en panneaux photovoltaïques, notamment en raison d’une faible résistance aux intempéries (tempête, grêle, neige).

De plus, les pompiers hésitent à intervenir en raison du risque de formation d’un arc électrique. De fait, les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) n’appliquent par les mêmes consignes, pointe du doigt l’étude. Dans un département, les pompiers interviendront même si une installation photovoltaïque est présente tandis que dans le département voisin ils laisseront le bien être consumé pour éviter d’être frappé par un arc électrique, assure l’agéa.

Les propositions de l’agéa pour lancer le débat

agéa formule donc six propositions pour améliorer l’assurabilité des installations photovoltaïques et accélérer la transition écologique :

  • Proposition n°1 : Créer un comité national pour la filière photovoltaïque, afin de fédérer l’ensemble des acteurs de l’assurance, du bâtiment, du secteur photovoltaïque et les pouvoirs publics, avec l’objectif de structurer la filière photovoltaïque et faciliter son assurabilité.
  • Proposition n°2 : Lancer un cadre expérimental temporaire pour faciliter les démarches de certifications futures des équipements et des procédés photovoltaïques.
  • Proposition n°3 : Créer une formation nationale et unique des installateurs de panneaux photovoltaïques, en différenciant les couvreurs et les électriciens.
  • Proposition n°4 : Appliquer la jurisprudence de la Cour de cassation de 2024 sur la responsabilité de l’installateur du panneau photovoltaïque, tout en restant vigilant à ne pas durcir les conditions d’assurabilité de ces équipements.
  • Proposition n°5 : Créer une obligation de maintenance annuelle des installations photovoltaïques, via une modification de l’article L. 224-1 du Code de l’environnement et renforcer les effectifs des contrôleurs du Consuel et mettre en place des actions de communication vers les exploitants de panneaux photovoltaïques pour les informer plus clairement du caractère obligatoire de l’attestation de conformité Consuel pour les installations électriques raccordées au réseau public de distribution d’électricité.
  • Proposition n° 6 : Développer la pratique des garanties d’aide au financement des installations photovoltaïques dans les contrats d’assurance multirisques habitation et multirisques professionnel, afin d’inciter les assurés à s’équiper en panneaux photovoltaïques, en concordance avec leurs assureurs.

« L’agéa formule ces propositions pour relancer le débat national. Il faut que les assureurs puissent faire fond sur des données et des techniques fiables afin de proposer des produits adaptés, conclut Pascal Chapelon. C’est à ces conditions que la filière photovoltaïque – constructeurs, installateurs, clients – pourra s’assurer ».

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