L’impact des systèmes solaires décentralisés sur l’extension du réseau en Afrique

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Avec l’aide de l’’imagerie satellite et de l’intelligence artificielle, l’Institut français des relations internationales (Ifri) a étudié l’installation dans les villes des systèmes solaires décentralisés en Afrique subsaharienne et leur impact sur le réseau électrique. « Le taux d’électrification n’est pas toujours un bon indicateur pour juger de l’accès réel à l’électricité, car il est à remettre dans le contexte de la la qualité et de la stabilité de l’approvisionnement électrique, justifient les auteurs Hugo Le Picard et Matthieu Toulemont. Le Nigeria a, par exemple, un taux de connexion au réseau d’environ 83,9 % dans les zones urbaines mais celui-ci ne fonctionne que 50 % du temps ».

De fait, cette faible fiabilité des réseaux, couplée aux prix élevés de l’électricité, incitent un nombre croissant de consommateurs urbains à investir dans leurs propres panneaux photovoltaïques en autoconsommation. Pour mesurer l’ampleur de ce phénomène, dans leur étude « Le solaire décentralisé à l’assaut des villes africaines. Une analyse originale d’analyse satellite et de Deep Learning », les chercheurs ont donc scanné plus de 4,6 milliards de mètres carrés de zones urbaines à la recherche de panneaux solaires, dans plus de 14 villes subsahariennes, puis les images ont été analysées avec la technologie de Deep Learning. Il ressort que la capacité solaire décentralisée installée se situe entre 184 MW et 231 MW. Cela représente près de 10 % de la capacité solaire installée totale dans la région (hors Afrique du Sud), soit environ 1,7 GW, note l’étude. De plus, l’observation ne couvre qu’un périmètre de 32 millions d’habitants, alors que l’Afrique subsaharienne compte plus de 80 villes de plus de 500 000 habitants, soit une population totale de 115 millions d’habitants.

A partir de cet échantillon, les auteurs font l’hypothèse que cette autonomisation pourrait fragiliser les fournisseurs et les réseaux centralisés. En effet, ce sont souvent les particuliers aux revenus médians ainsi que les petits commerces et industries qui ont les moyens de s’équiper en systèmes en autoconsommation. « Compte tenu de la situation financière difficile dans laquelle se trouvent presque toutes les compagnies d’électricité africaines, la perte partielle à court terme de leurs meilleurs clients porterait un coup sévère à leurs finances, avancent Hugo Le Picard et Matthieu Toulemont. De surcroît, la viabilité financière des stratégies d’extension du réseau central vers les consommateurs les plus pauvres des zones périurbaines et rurales adjacentes repose sur des subventions croisées. En effet, les plus importants consommateurs paient des tarifs plus élevés que les plus pauvres, qui consomment moins et bénéficient ainsi de tarifs subventionnés. Ce système risque de trouver d’autant plus vite ses limites si les clients les plus rentables des villes se détournent du réseau. L’autonomisation des consommateurs pourrait donc contribuer à fragmenter les réseaux centralisés subsahariens ». Selon eux, ce phénomène devrait être donc mieux pris en compte dans l’élaboration de politiques publiques futures, afin de continuer à œuvrer au bon développement des systèmes électriques d’Afrique.

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