Comment le vehicle-to-grid maximise l’autoconsommation solaire

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En matière de convergence entre la production d’énergie solaire et la mobilité électrique, l’intérêt d’installer des panneaux photovoltaïque en toiture pour recharger un ou plusieurs voitures n’est plus à démontrer et séduit de plus en plus d’entreprises et de particuliers. Lors d’une table ronde organisée lors de l’Université de l’autoconsommation d’Enerplan les 20 et 21 septembre, plusieurs experts sont venus explorer un autre pan de cette synergie, à savoir les services rendus par la charge bidirectionnelle des véhicules sur le système électrique. Autrement dit, comment les véhicules électriques peuvent servir de stockage stationnaire et optimiser l’autoconsommation solaire.

L’enjeu du Vehicle-to-Home

« Notre idée était à l’origine d’installer une batterie stationnaire de 50 kWh, permettant d’effacer la consommation du bâtiment pendant deux heures. Puis, nous avons constaté qu’avec les véhicules électriques que nous avons sur le parking, nous avons un potentiel de stockage de près de 600 kWh », a fait observer Edouard Céreuil, de la direction technique de Morbihan Energies. Avec Renault, le syndicat public qui gère la fourniture et de la distribution d’électricité sur le territoire, a mis en place en 2020 un projet de type “micro-grid” sur un village vacances VVF sur Belle-Île-en-Mer. FlexMob’Île vise à réduire l’empreinte carbone en limitant les rotations de tankers qui approvisionnent l’île en carburant, et à réduire l’empreinte carbone du chauffage des bâtiments. « Les véhicules électriques sont achetés pour se déplacer, mais peuvent indirectement rendre un certain nombre de services énergétiques », a poursuivi Edouard Céreuil. Le premier volet du projet utilise donc dix batteries de Zoé de seconde vie reconditionnées, utilisées comme stockage stationnaire de 200 kWh. « L’enjeu est de standardiser le reconditionnement, notamment en termes de gestion de sécurité, pour baisser les coûts par rapport à l’utilisation des batteries neuves », a toutefois nuancé Edouard Céreuil.

Le deuxième aspect porte sur l’utilisation d’un véhicule bidirectionnel, une Zoé légèrement modifiée pour fonctionner en courant alternatif et décharger l’électricité dans le bâtiment quand elle n’est pas utilisée. Le tout est complété par une centrale photovoltaïque en toiture de 77 kWc et le taux d’autoconsommation est maximisé grâce à ces deux solutions de stockage. « Cela nous permet de basculer de 60 % d’autoconsommation à près de 95 % », chiffre Edouard Céreuil. Il note toutefois des freins au niveau technique. « Les solutions prises séparément fonctionne de manière assez simple, poursuit-il. Mais la difficulté est de faire communiquer les protocoles. Le monde des bâtiments tertiaires fonctionne en modbus, celui des bornes de recharge en OCPP. Il faudrait une standardisation des protocoles de communication, pour accroître la réplicabilité des solutions et baisser les coûts ».

Atteindre des niveaux d’autoconsommation de 70 %

« Deux révolutions sont en cours parallèlement dans l’environnement résidentiel, a pour sa part assuré Laurent Schmitt, responsable du développement Europe de l’entreprise canadienne DCBEL. Le plan européen RePowerEU veut multiplier par quatre l’autoconsommation solaire et on vit une introduction massive de véhicules électriques. Ils pourraient être 60 millions d’ici à 2030, dont 88 % de la charge s’effectue au domicile. Cela signifie un besoin de 29 millions de bornes à installer. La combinaison des deux offre un environnement intéressant pour maximiser l’autoconsommation ».

L’entreprise basée à Montréal est donc en train de développer une « station énergétique résidentielle », qui comprend une centrale photovoltaïque, une borne de charge bidirectionnelle pour le VE et un outil qui optimise la revente du surplus de production sur la base d’une tarification dynamique pour aller au-delà des 10 ct/kWh. L’entreprise qui souhaiterait lancer son produit entre mars et juin 2023 est actuellement à la recherche d’installateurs partenaires. « Nos simulations ont montré qu’avec une centrale photovoltaïque de 9 kWc et un véhicule électrique qui roule 20 000 kilomètres par an, on atteint des niveaux d’autoconsommation qui peuvent aller jusqu’à 70 %, avec une valorisation du surplus auprès des agrégateurs ou en autoconsommation collective ».

Associer recharge bidirectionnelle et autoconsommation, c’est également ce que l’entreprise Cythelia Energy, bureau d’étude et développeur de solutions logicielles qui fait partie du groupe Trace, a souhaité pour son nouveau siège social à Bourget du Lac, conçu comme un véritable démonstrateur. « Il s’agit d’un bâtiment à énergie positive, qui associe de la géothermie (avec des sondes à 100 mètres de profondeur), une pompe à chaleur et une centrale photovoltaïque de 70 kWc », a décrit Benoît Lelong, directeur de Cythelia Energy. Celle-ci comprend des panneaux bifaciaux sur le parking (dont le sol est peint en blanc pour augmenter la réverbération) et des trackers en toiture. « Aujourd’hui, nous avons un taux d’autoconsommation de 30 % et une valorisation du surplus en autoconsommation collective avec la Chambre des métiers qui se situe juste à côté et d’autres bâtiments devraient rejoindre l’opération ».

Par ailleurs, un système de stockage de l’énergie a été pensé depuis le début du concept. « Nous avions pensé à un stockage stationnaire et puis, finalement, pour des raisons financières et comme nous croyons beaucoup à la charge bidirectionnelle, nous avons privilégié le développement d’un stockage via véhicules ». Celui-ci devrait être opérationnel à la fin de l’année, après la livraison de la borne de recharge qui fonctionnera avec un EMS (système de management de l’énergie) pour gérer l’énergie. Le premier véhicule à participer à l’opération sera une voiture d’entreprise Nissan Leaf avec protocole CHAdeMO qui permet la charge bidirectionnelle. « Avec un stockage de 50 kWh et un véhicule qui reste stationné, nous avons déjà démontré que nous pouvons accroître le taux d’autoconsommation de 30 % à 50 %, assure Benoît Lelong. Quand les salariés utiliseront le véhicule, ce taux va bien sûr baisser mais nous avons déjà en projet d’acquérir d’autres bornes et véhicules pour augmenter le taux d’autoconsommation ».

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