Pénurie à court terme et incertitudes à long terme pèsent sur l’hydrogène vert

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D’après pv magazine international.

Un groupe de chercheurs allemands et américains affirme que l’hydrogène vert et les carburants de synthèse qui en sont dérivés fourniront probablement moins de 1 % de l’énergie finale d’ici 2030 en Union européenne et d’ici 2035 dans le monde entier si l’électrolyse croît aussi rapidement que l’éolien et le solaire par le passé.

« D’ici 2040, une avancée majeure vers des parts plus élevées est davantage probable, mais de grandes incertitudes demeurent, avec un intervalle interquartile de 3,2 à 11,2 % (UE) et de 0,7 à 3,3 % (monde) », ont déclaré les chercheurs. Ils ont donné à entendre qu’une pénurie à court terme et des incertitudes à long terme ralentiront les investissements dans les utilisations finales de l’hydrogène et ses infrastructures, réduisant ainsi le potentiel de l’hydrogène vert et mettant en péril les objectifs climatiques.

« Toutefois, les précédents historiques tendent à indiquer que les mesures politiques d’urgence pourraient promouvoir des taux de croissance nettement plus élevés, accélérant une percée décisive et augmentant la probabilité de la disponibilité future de l’hydrogène », ont expliqué les chercheurs dans « Probabilistic feasibility space of scaling up green hydrogen supply », récemment publié dans Nature Energy.

Tout en reconnaissant l’importance de la demande, des infrastructures et de la capacité des énergies renouvelables, les chercheurs ont retenu les électrolyseurs comme variable pour le développement de l’hydrogène. Ils ont fondé leurs conclusions sur les données de 2021, mais ont confirmé la validité de leur modélisation à pv magazine.

« Stimulée par des politiques concrètes de soutien au développement de l’hydrogène vert, l’année écoulée a enregistré une impulsion importante dans les annonces de projets d’électrolyse et les décisions finales d’investissement qui y sont liés, a indiqué le chercheur Adrian Odenweller. Cependant, en raison des délais de réalisation longs et du temps nécessaire à la construction, les décisions d’investissement final prises récemment ont peu de chances de se traduire par des projets en exploitation dès l’an prochain. C’est pourquoi nous avons choisi 2023 comme “année initiale” dans notre modèle. »

Les chercheurs ont salué les programmes de soutien récemment annoncés en Europe et en Amérique du Nord, comme le crédit d’impôt pour l’hydrogène vert aux États-Unis ou la création d’une banque européenne visant à promouvoir le développement de l’hydrogène.

« La banque européenne dédiée à l’hydrogène étaye des objectifs très ambitieux en matière d’hydrogène vert avec des mesures politiques concrètes, a ajouté Adrian Odenweller. Il s’agit d’un pas indispensable dans la bonne direction. Reste à voir quelle sera sa conception précise et comment se fera l’allocation des fonds. »

D’après l’universitaire, qui travaille à l’Institut de recherche de Potsdam sur les effets du changement climatique, atteindre l’objectif du plan REPowerEU en matière de production interne d’hydrogène renouvelable (10 ) nécessite des taux de croissance sans précédent en termes de technologies énergétiques.

« La crise énergétique actuelle pourrait créer une opportunité pour catalyser la transition énergétique en stimulant l’investissement dans les technologies des énergies renouvelables. Néanmoins, il faut garder à l’esprit que cela devrait comprendre toutes les technologies zéro carbone cruciales, et pas uniquement l’hydrogène vert, a observé Adrian Odenweller. Ainsi, si les responsables politiques décident d’opter pour l’effort de guerre, leurs mesures devront tout de même trouver le juste équilibre entre les différentes technologies. »

Selon les chercheurs, les incertitudes sont dues à l’absence d’une technologie d’électrolyse dominante ainsi qu’à des éléments de preuve contradictoires concernant le coût des différentes chaînes d’approvisionnement de l’hydrogène.

« Il est probable que les premières importations à grande échelle d’hydrogène puissent se faire aux alentours de 2030. Les importations par pipeline affichent un potentiel élevé de réduction de coûts, mais les estimations de coûts demeurent incertaines », précise Adrian Odenweller.

Une autre incertitude porte sur la vitesse à laquelle l’approvisionnement en hydrogène vert peut croître.

« Les données empiriques indiquent que des technologies modulaires à petite échelle sont adoptées plus rapidement que les technologies à grande échelle. Les électrolyseurs étant eux aussi modulaires, ils pourraient donc se développer à grande vitesse, a déclaré Adrian Odenweller à pv magazine. Toutefois, les infrastructures de l’hydrogène sont lourdes, coûteuses en matériel et en main-d’œuvre, ce qui les rend moins souples pour une prise en main et une adoption rapides. »

Les chercheurs suggèrent que les responsables politiques prévoient également des subventions, par exemple pour le co-financement des dépenses en capital destinées aux électrolyseurs du côté de l’offre, mais aussi pour les dépenses de fonctionnement des processus industriels du côté de la demande. À titre d’exemple, Adrian Odenweller a mentionné des contrats d’écart compensatoire appliqué au carbone. Il a en outre averti que les investissements devraient cibler en priorité l’hydrogène dans les applications d’utilisation finale où l’électrification directe est infaisable.

En ce qui concerne les politiques additionnelles, les chercheurs considèrent le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) comme un instrument potentiellement utile.

« Le MACF devrait être ajusté de sorte que l’hydrogène et les combustibles qui en sont dérivés, tels que l’ammoniac, soient inclus dans toutes les émissions en amont », ont-ils ajouté.

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