Au Maroc, le secteur de l’autoconsommation C&I en attente de la publication des tarifs d’injection

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« Jusqu’à il y a deux ans, le marché marocain était principalement dominé par le solaire à grande échelle et le C&I n’était pratiquement pas un sujet. Mais c’est en train de changer rapidement », explique à pv magazine France Soufiane Chaibainou, directeur des ventes du développeur marocain Gaia Energy, rencontré sur le salon “Solaire Expo Maroc” à Casablanca. La raison : l’arrivée pour 2026 de la taxe carbone aux frontières de l’Union européenne. « La très grande majorité des sociétés marocains exportent vers le continent européen et doivent donc baisser le contenu carbone de leurs produits, poursuit le responsable. L’un des moyens les plus rapides de le faire est d’investir dans l’efficacité énergétique et dans la production d’énergie renouvelable, en particulier solaire ». De plus, le Maroc dispose de l’un des prix de l’électricité les plus élevés dans toute l’Afrique du Nord.

C’est pourquoi le nombre de projets d’autoconsommation dans le commercial et industriel (C&I) progresse rapidement dans le Royaume. Preuve en est, Gaia Energy vient d’inaugurer une centrale photovoltaïque de 386,41 kWc située sur le toit de l’usine de câblage automobile de FIT Voltaira Morocco située dans la plateforme industrielle Tanger Med. Et il n’est pas le seul.

20 % des consommations de l’usine de Safran Nacelles à Casablanca sont couvertes par une centrale photovoltaïque en autoconsommation de 1,7 MWc.

Image : Safran

L’IPP norvégien Empower New Energy a ainsi inauguré une centrale photovoltaïque de 828 kWc sur le toit de l’entreprise agroalimentaire spécialiste de l’aviculture Zalar Holding à Mediouna, situé dans la région de Casablanca. Il s’agit de la première d’une série de quatre installations solaires en toiture pour Zalar Holding, d’une capacité combinée de 2,5 MWc, représentant un investissement d’environ 2 millions d’euros. De son côté, Safran Nacelles Morocco a mis en service en 2022 une centrale de 1,7 MWc sur le toit de son usine de Nouaceur, pour couvrir 20 % de sa consommation électrique. Pour sa part, EDF Maroc affirme avoir déjà développé une poignée de projets en autoconsommation, et disposer de plusieurs MW en projet.

Les tarifs publiés avant juin ?

Toutefois, « le Maroc n’a pas encore autorisé l’injection sur le réseau moyenne et basse tensions, c’est ce qui freine un peu le développement de l’autoconsommation », tempère Fatima Zahra Rhzali, cadre commerciale chez Cleanergy, société marocaine distributrice de solutions solaires, mais aussi de pompage solaire. Certes, le projet de loi n°82.21 relative à l’auto-production énergétique a été adoptée en décembre 2023. Mais celle-ci limite à 20% le seuil de vente de l’excédent de production aux gestionnaires de réseaux électrique BT et MT. « Qui plus est, les décrets d’application et les tarifs d’achat n’ont toujours pas été publiés », regrette un acteur, qui rappelle que 90 % du tissu industriel est composé d’entreprises et d’industriels connectés au réseau BT et MT.

Dans un communiqué de presse édité le 5 février 2024, l’Autorité Nationale de Régulation de l’Électricité (ANRE) indique donc « travailler sur la fixation du tarif de l’excédent pouvant être cédé par les producteurs au titre de la loi 13.09 relative aux énergies renouvelables, et de la loi 82.21 relative à l’autoproduction de l’énergie électrique aux gestionnaires des réseaux électriques, dont une décision sera prise avant fin juin 2024 ».

En attendant, l’absence de tarifs d’injection limite fortement la rentabilité des projets et freine les industriels. « A l’heure actuelle, soit le surplus de production est perdu, soit il est injecté sur le réseau gratuitement », résume un autre développeur. Les énergéticiens anticipent cependant et continuent de développer des projets. Mais, outre la rentabilité, l’absence de feed-in-tarifs rend également les structures juridiques complexes. Ainsi, certains d’entre eux, en l’absence de PPA nouent avec leurs off-takers des Power Purchase Lease (PPL) sur l’électricité, tandis que d’autres signent des PPA avec une clause indiquant que ces derniers ne seront effectifs qu’une fois les tarifs d’achat publiés.

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