Depuis le lundi 16 juin, l’Assemblée nationale examine la proposition de loi portant programmation nationale énergie et climat pour les années 2025 à 2035. Si le but était de s’accorder sur la relance du nucléaire, force est de constater que les débats virent à l’acharnement contre les renouvelables. Jeudi 19 juin, c’est ainsi que l’amendement n°486, déposé par le groupe Les Républicains pour imposer un « moratoire » sur l’éolien (terrestre ou maritime) et le solaire photovoltaïque, a été voté à 65 voix “pour” et 62 “contre”, contre l’avis du gouvernement. L’ajout a été adopté grâce aux voix Rassemblement national : 57 des 65 voix “pour” émanent du groupe présidé par Marine Le Pen.
Le texte précise qu’aucune nouvelle demande d’autorisation, de permis ou de raccordement concernant de telles installations ne pourra être déposée ou instruite (…) pendant la durée du moratoire. « Sur le plan politique, le vote de cet amendement est d’une particulière gravité et confirme l’irrationalité des débats parlementaires en cours sur la feuille de route énergie-climat de la France, a réagi l’avocat Arnaud Gossement. Les signaux envoyés aux filières, investisseurs depuis le début de la discussion de cette proposition de loi sont inquiétants ».
Enerplan en appelle aux députés
Le syndicat Enerplan a de son côté immédiatement demandé « aux députés de ne pas voter cet amendement, irresponsable et potentiellement dévastateur, lors des prochaines étapes d’examen du texte ». Le vote de l’Assemblée nationale n’est en effet pas définitif puisqu’après son éventuelle adoption lors d’un vote solennel prévu mardi prochain, le 24 juin, la proposition de loi devra en effet retourner au Sénat le 8 juillet prochain en seconde lecture.
« Voté dans un hémicycle quasiment vide, en plein milieu de la nuit, ce moratoire n’a aucune valeur. La majorité présidentielle brille par son absence dans les bancs de l’Assemblée et laisse le champ libre à la droite et à l’extrême-droite, qui sont notoirement pro-nucléaire et anti-éolien. Je suis persuadé que l’amendement sera annulé au plus tard en commission mixte paritaire », s’est voulu rassurant Charles de Courson, député dans la 5ᵉ circonscription de la Marne (Centre), fervent défenseur des renouvelables, interrogé par pv magazine France.
Un autre élu local nous indique que ce vote est la manifestation de la déconnexion croissante entre les territoires et les députés nationaux. « Il faut qu’ils viennent voir sur le terrain que les parcs renouvelables sont plutôt bien acceptés par la population et leurs représentants », assure-t-il. Un sondage réalisé par Opinion Way montre d’ailleurs que 68 % des maires français sont satisfaits des parcs solaires et éoliens présents sur leurs communes.
Il n’en reste pas moins que le vote de cet amendement est symptomatique de l’absence de rationalité qui règne aujourd’hui dans les débats nationaux. Charles de Courson fait ainsi les comptes : « le photovoltaïque produit actuellement à moins de 70 euros du MWh, quand la production de Flamanville risque de ne pas descendre en dessous des 120 euros/MWh. Ce sera donc aux consommateurs de payer pour ces décisions idéologiques ».
Les renouvelables, énergies carbonées ?
Plus tôt dans la semaine, c’était un amendement retirant le solaire et l’éolien de la définition des énergies décarbonées (amendement n°279) qui avait été voté. « Nous avons atteint un seuil critique, celui de la crédibilité de l’action politique. Dessiner l’avenir énergétique de la France en décidant, par pure convention politicienne, que le solaire et l’éolien devaient être exclus de l’équation est totalement irresponsable. Notre secteur économique demande solennellement au gouvernement et au rapporteur, qui sont les seuls acteurs capables de déposer encore des amendements à ce stade de l’examen du texte, de faire des propositions afin d’éviter une véritable aberration énergétique », s’est insurgé Jules Nyssen, président du Syndicat des énergies renouvelables.
Si l’Assemblée nationale a ensuite rétabli (partiellement) la situation et réintroduit les énergies renouvelables dans la programmation énergétique de la France sous la pression du gouvernement, l’incertitude reste toutefois entière sur le texte final. Certes, un amendement (n°601), déposé par les députés socialistes et adopté jeudi 19 juin, fixe un objectif d’au moins 200 TWh issus de sources renouvelables sur 560 TWh de production d’électricité décarbonée en France en 2030. Mais cela reste une maigre consolation au regard de l’absence d’inscription d’objectif chiffré par filière (éolien, hydraulique, solaire…).
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