[L’acteur de la semaine] Symphonics, chef d’orchestre de la flexibilité

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Fondée en 2023 par Mathieu Rochard et Xavier Clabaut, deux anciens d’EDF et du Groupe Total, Symphonics est une scale-up française spécialisée dans le pilotage intelligent des équipements de production, de fourniture, de stockage et de consommation d’électricité. Grâce à sa plateforme, connectée à 400 000 équipements électriques (chauffage, ballon d’eau chaude, pompe à chaleur, batterie, borne de recharge, etc.), Symphonics réduit les factures d’énergie de 80 000 clients – résidentiels, tertiaires et industriels –, en décalant automatiquement leurs consommations vers des heures où l’énergie est la moins chère et la moins carbonée.

Agrégateur de surplus électriques et opérateur d’effacement de consommation certifié par RTE, labellisé Deeptech par BPI France, la start-up parisienne membre de la Suntech a franchi, cet automne, une nouvelle étape de son développement, avec le lancement d’une offre de fourniture d’énergie. Le 12 octobre, Symphonics a, en effet, obtenu l’autorisation de Bercy d’exercer l’activité d’achat d’électricité pour revente aux clients résidentiels et non résidentiels, ainsi qu’aux gestionnaires de réseaux, devenant ainsi le premier acteur intégré sur l’ensemble de la chaîne de valeur de l’électricité.

À quelques jours de l’ouverture du salon Energaïa, à Montpellier (10-11 décembre), Mathieu Rochard, directeur général de Symphonics, répond aux questions de pv magazine France.

pv magazine France : Comment est née Symphonics ?
Mathieu Rochard : L’idée de créer Symphonics a germé dans le bureau de Patrick Pouyanné, PDG du groupe Total, où Xavier Clabaut et moi nous sommes retrouvés, après avoir tous les deux débuté dans la grande maison d’EDF, dans les années 2000. Évoluant dans le même monde, nous savions que l’intermittence des renouvelables, en développement dans le mix énergétique, imposait un besoin permanent de rééquilibrage court terme. En parallèle, Xavier avait monté une société de flexibilité dans le domaine industriel… Avec mes compétences en matière d’efficacité énergétique, la jointure a été vite faite. Notre postulat de départ était le suivant : la flexibilité du système électrique ne peut se concevoir sans une vision pilotée. Pour cela, il faut, dans le très court terme, pouvoir jouer directement sur les actifs, en arrêtant des centrales solaires directement à distance, par exemple, mais aussi en modulant la consommation. C’est cette « mise en musique », qui est à l’origine de Symphonics.

Quels moyens avez-vous déployé pour parvenir à cette « harmonie » ?
Il nous fallait d’abord un outil qui nous permette d’avoir la main en temps réel sur des équipements de consommation et de production électriques. Pendant un an et demi, nous avons construit et amélioré notre plateforme. Elle compte aujourd’hui près 400 000 équipements connectés. Puis, nous avons commencé à agréer notre portefeuille et à commercialiser. C’est un peu compliqué de gérer tout ça et c’est pas mal de boulot…

À quel stade d’évolution en êtes-vous aujourd’hui ?
Comptant une trentaine de personnes parmi ses effectifs, Symphonics gère actuellement 80 000 sites clients au sens des PDL (points de livraison), à 90 % dans le secteur résidentiel, avec des puissances de pilotage comprises entre 1 kW et 2 MW pour le C&I. C’est dire si notre spectre d’intervention est large. Notre objectif est d’atteindre 1 million d’équipements connectés et 100 MW pilotés en temps réel fin 2026. En ce qui concerne l’offre de fourniture d’électricité, nous visons, à la même échéance, le cap des 25 000 clients et 250 GWh.
Pour une société qui a mis moins de deux ans à se développer, Symphonics affiche une croissance rapide et maîtrisée. Nous avons été rentables dès le premier jour. C’est sur ce modèle que nous nous sommes construits et qui nous confère une certaine indépendance. On regarde même aujourd’hui vers l’Espagne et le Portugal pour étendre nos activités, sachant qu’en dehors de quelques subtilités locales à considérer, on peut très facilement aller sur d’autres marchés.

Quel est votre rôle en tant qu’acteur d’ajustement agréé par RTE ?
L’arrêté du 8 septembre 2025, qui autorise désormais les parcs solaires à accéder à des compléments de revenus via le marché de l’ajustement, a ouvert de nouvelles perspectives. Quand, à la demande de RTE, nous arrêtons une centrale solaire à distance pour sécuriser le réseau, le producteur touche une rémunération et l’énergie non produite pendant l’arrêt lui est également rémunérée. Ce système fonctionne pour toutes les centrales en exploitation, même avec un contrat d’obligation d’achat en S21.

Le service de Symphonics étant gratuit, de quelle manière vous rémunérez-vous ?
Il n’y a pas de magie, je vous rassure… Nous ne sommes pas des Harry Potter ! C’est un service non vendu, en effet. Il est gratuit et sans engagement. Il suffit que nos clients acceptent, par contrat, que nous nous connections à leurs appareils électriques. En fonction de différents paramètres comme la météo, Symphonics programme chaque équipement pour qu’il fonctionne, quand c’est possible, pendant les heures creuses – au moment où le kWh coûte moins cher – ou lors de la cloche solaire, si une installation photovoltaïque est reliée. Ça ne coûte rien au client, il voit juste sa facture baisser.
Symphonics profite, dans le même pas de temps, du déplacement de chaque heure pleine vers une heure creuse pour valoriser l’opération sur les marchés. Le but ?  Vendre une heure pleine, chère, et racheter une heure creuse, moins chère, en se rémunérant sur la différence. Cela ne représente que quelques centimes par opération, mais mis bout à bout, tous les jours, ça paie le service rendu au client. Évidemment, plus on arrive à déplacer d’heures pleines vers les heures creuses, plus le client est gagnant et plus nous nous créons de possibilités de valorisation. L’alignement d’intérêt entre nous est donc très fort.
Notre deuxième levier de valorisation est ce qu’on appelle le marché de la capacité. Par exemple, quand tout le monde allume son grille-pain, le 16 janvier à 19 h, il se produit un appel de puissance considérable. Pour RTE, c’est un enfer à gérer. Dans ce cas-là, on rend service au réseau, en décalant, quand c’est possible, la consommation de 19 h à 20 h et RTE nous rémunère en conséquence.

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