La filière de l’autoconsommation (AC) solaire s’est retrouvée pour son rendez-vous annuel lors de la huitième édition de l’Université de l’autoconsommation photovoltaïque, qui s’est tenue ce mercredi 1er octobre à l’espace Saint Martin à Paris. Organisé autour de tables rondes et de présentations, cet événement professionnel avait pour thème central « valoriser l’électricité solaire en circuit court ».
Exorciser l’EnR bashing
Sans surprise, le spectre de l’EnR bashing (ie. le dénigrement des énergies renouvelables, entretenu par les pro-nucléaire, la droite et l’extrême droite) planait dans la salle. D’ailleurs, devant un parterre de convertis, les intervenant·es n’ont pu s’empêcher de livrer quelques prêches, autant pour se convaincre du bienfondé du modèle que pour s’encourager à poursuivre.
Le solaire produirait trop d’électrons pour une électrification encore trop lente ? RTE a annoncé 21 GW de projets ayant sécurisé un droit d’accès au réseau. 89 TWh d’électricité ont été exportés mobilisant les réseaux pour peu de besoin en 2024 ? Oui, mais c’est autant d’argent qui entre dans les caisses de l’État. Le solaire coûterait des milliards ? 40 euros/MWh en injection réseau dans le solaire résidentiel avec un coût unitaire qui intègre la dette, le raccordement et les démantèlement, qui peut dire mieux ?
En fait, les institutions représentées n’affichaient clairement pas d’hostilité envers la filière : représentées dans le premier panel d’ouverture, Enedis, la DGEC (direction générale de l’énergie et du climat) et le Conseil supérieur de l’énergie accompagnent le développement photovoltaïque depuis longtemps. Jean-Luc Fugit, député et rapporteur du budget énergie, a même affirmé qu’il prendrait les retours de la filière pour le débat budgétaire en cours – mais a dû partir pendant le panel, dommage !
Point sur les dossiers réglementaires en attente
Comme on l’entend dans les couloirs, la filière fait face à un “attentisme” généralisé. Et pour cause, plusieurs dossiers réglementaires restent en attente de validation, ou bien en suspens, face à des évolutions très rapides dans le photovoltaïque et l’AC. Ce décalage crée des blocages concrets mais aussi de nouveaux champs de réflexion.
Par exemple, si d’un point de vue technique, le mécanisme heures pleines/heures creuses est validé, il reste qu’il réduit la valeur de l’électron produit en heures de forte production, ce qui pose la question des modèles de valorisation de l’énergie.
Plus problématique : la nouvelle version de la norme NFC 15-100, entrée en vigueur en septembre, souligne qu’il ne faut pas de générateur directement dans les prises, condamnant de facto les dispositifs plug and play. « Les standards sont définis, il faut éclaircir la norme car le cas échéant ce ne sont pas uniquement des questions de sécurité mais des questions d’assurance », soutient Laurent Kueny, directeur de l’énergie à la DGEC. De son côté Laetitia Brottier regrette la situation, alors même que les dispositifs plug and play se sont démontrés être des portes d’entrées efficaces au solaire, qu’ils ont un fort succès en Allemagne (sans accident à date) et qu’un travail important avait été fait en 2023 « avec l’Ademe, les sachants électriques et la filière » pour étudier la question – travail ayant débouché sur un guide pratique disponible en ligne.
La vice-présidente solaire et bâtiment d’Enerplan est aussi revenue sur l’exonération des taxes assises pour les opérations d’AC collective de moins de 1 MW, voté l’année dernière mais rendue inapplicable quelques mois plus tard. « Un contentieux est actuellement mené par Enerplan pour régler ce dossier ».
Toujours dans l’AC collective, si certains trouvent contraignant et artificiel la nécessité d’intégrer une opération de fourniture dans chaque boucle (qui doit par ailleurs déjà être intégrée dans le périmètre d’équilibre d’un opérateur) la DGEC a expliqué que ce principe serait maintenu car « il fait sens ». Laurent Kueny a toutefois concédé qu’il fallait surement aménager les contraintes pour obtenir le statut de fournisseur, afin de rendre la procédure plus accessible.
Les bonnes pratiques pour des perspectives pérennes
S’agissant de son champ d’action direct, la DGEC a souligné la nécessité de légiférer sur une pratique constatée aujourd’hui : certains opérateurs choisissent de consacrer leur production à l’AC lorsque les prix sont bas, mais de la revendre sur le marché lorsque ceux-ci deviennent plus avantageux. Cette pratique d’arbitrage, loin d’être vertueuse, fragilise à la fois le modèle de l’AC et l’équilibre du réseau.
L’encadrement de la filière est de plus en plus strict qu’elle se développe. Car le marché continue de se massifier et se diversifier, malgré les difficultés réglementaires et le bashing politique. L’appel d’offre simplifié en cours est la preuve : on y retrouve beaucoup de projets en AC ce qui valide la rentabilité du modèle.
Alors est-ce que l’obligation réglementaire de solarisation des parkings et bâtiments restent nécessaire si le photovoltaïque est rentable ? Oui mais c’est comme la ceinture de sécurité, qui a un avantage évident (elle sauve la vie) mais qu’on doit quand même imposer, plaisante Edouard Roblot, directeur Energies Solaires d’IDEX. Le développeur rappelle d’ailleurs pour certains acteurs, ce n’est d’ailleurs pas la rentabilité qui est recherchée, mais plutôt la stabilité des prix.
Pour Nicolas Goldberg, directeur associé au Cabinet Colombus Consulting, qui conclut la matinée, le photovoltaïque confirme sa nature de filière innovante, avec les avantages et les inconvénients qui vont avec. Il faut cependant se préparer à affronter et répondre aux attaques, qui vont logiquement se poursuivre, en mettant en avant les briques de solutions concrètes existantes et en respectant rigoureusement les normes et consignes pour assurer la pérennité du développement.
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