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pv magazine : Le prix des panneaux solaires progresse. Quelles sont les causes de cette montée des prix ?

Julien Chirol : Le prix des panneaux a augmenté de 25 % depuis le début de l’année, notamment pour les panneaux asiatiques. La première cause en est la hausse du prix du verre, mais il s’agit d’une hausse conjoncturelle en train d’être résorbée. Cela a été sensible notamment au 4e trimestre l’an dernier. Par ailleurs, le prix des transport a été multiplié par trois ou quatre, et le blocage du canal de Suez a remis de l’huile sur le feu. Jusque-là, le prix du transport représentait quelque 3 % du prix des panneaux solaires, cette part est passée à 10 % environ. Ainsi, le coût du transport par panneau qui était plutôt de 0,5 cent, est désormais de 2 cents. Enfin, le plus gros facteur de cette hausse des prix des panneaux est la montée du prix du silicium. Celui-ci a grimpé de 70 %/80 % depuis le quatrième trimestre 2020, et pèse environ 25 % du prix du panneau aujourd’hui.

En outre, on retrouve le danger qui existe sur de nombreux marchés, avec des oligopoles qui se constituent. Cinq à six sociétés ont le marché et font un peu ce qu’elles veulent. Avec la consolidation du marché, le risque est bel et bien de se retrouver avec un oligopole dans la fabrication de modules.

La relocalisation est à l’ordre du jour…

Heureusement que l’on relocalise. Cela a des avantages, et la situation actuelle de remontée des prix redonne de la compétitivité aux fabricants européens, moins impactés par la hausse du transport. Côté matières premières, les volumes en Europe sont encore faibles, donc cela n’impacte pas la compétitivité. Le delta (de prix) entre fabricants asiatiques et européens n’a jamais été aussi faible. Cela constitue une aubaine pour reprendre de la part de marché.

Reste que si les assembleurs européens augmentent tous leurs capacités de production, les grands asiatiques atteignent 50 à 60 GW en fin année, alors que les plus gros européens seront à peine à 1 GW par an.

Julien Chirol – Directeur France de BayWa r.e. Solar Systems

BayWa r.e.

Quelles sont les caractéristiques du marché français ?

Le « critère carbone » est une marque de fabrique en France. Ce qui fait que sur le marché du résidentiel, les appels d’offres (AO) publics permettent un maximum de produits européens. Néanmoins, il y a un gros danger car des projets ne vont peut-être pas se faire à cause de ce critère. En outre, le marché français représente à peine 0,7 % à 1 % du marché mondial.

Et les risques de tension au niveau mondial existent. Nous sommes sur un marché offre/demande. Or, la demande est déjà forte, avec des projets qui n’ont pas été réalisés 2020 et qui sont décalés. Les gros investisseurs peuvent se le permettre. En plus, la Chine, qui est le 1er marché mondial, vise entre 60 et 75 GW, l’Inde prévoit des droits douaniers au deuxième trimestre 2022, en attendant, Delhi va sûrement importer un maximum avant cette date fatidique.

Ainsi, le critère carbone ne serait valable que s’il était instauré au niveau européen, ce qui permettrait de représenter entre 15 % et 20 % du marché mondial… Et peser sur les commandes. La Corée du Sud est le seul autre pays à faire jouer un tel critère dans ses AO.

Quelle réactions à ces hausses de prix des panneaux ?

Avec les fabricants asiatiques, nous misons sur la fidélité et la continuité dans les commandes. Les commandes « spots » ne sont pas privilégiés. Nous essayons de travailler main dans la main avec les fournisseurs, en anticipant au maximum les commandes, tout en sachant que ce n’est pas parce qu’on passe commande à l’avance que l’on reçoit à ce prix-là…

Par ailleurs, il est possible de faire du stock, en augmentant les capacités de stockage, temporaire et permanent… Notamment si le marché se tend avec la montée de la Chine et de l’Inde. Mais cela nécessite des investissements supplémentaires.

Par ailleurs, il ne faut pas négliger que le cours du cuivre a lui aussi explosé, donc le prix du câble, et ainsi le coût total des installations qui augmente.

Sur les projets à assez long terme, nous pouvons anticiper une baisse du prix des matériels… Les fabricants augmentent grandement leurs capacités de production, mais avec le décalage de moyens qui devaient être faits en 2020 sur 2021, nous misons sur un retour à la normale en 2022. Mais si un « variant indien » intervient, tout cela peut repartir à la baisse…

La crise va renforcer les partenariats, c’est une direction qu’on retient. Nous avons déjà de tels partenariats sur les panneaux avec JA Solar, Trina, Longi, Hyundai et Voltec, et LG Electronics. D’autres sont à venir dans les semaines prochaines.

Enfin, dernier composant atteint, les onduleurs. Nous pressentons un risque d’augmentation des prix sur ces équipements et les délais de livraison sont en train de s’allonger. Nous avons déjà connu des grosses crises, et nous avons travaillé avec un stock conséquent.

Face à la baisse des tarifs d’achat, n’y-a-t-il pas un potentiel « effet ciseau » ?

Il y a bien un effet ciseau en France. Mais, grâce ou à cause de l’inertie entre installation et vente, on est quand même dans une euphorie, car on est encore sur les ventes de fin 2019 et de 2020. Le délai entre tarifs de rachat, notamment sur marché agricole et commercial et industriel, date signature et installation est de 12 à 18 mois, donc nous vivons encore sur les ventes de cette époque.

En revanche, sur le marché des moyennes toitures (moins de 100 kWc), quand on voit la file d’attente, c’est un marché en pleine explosion mais dont les coûts d’achat augmentent mais les tarifs d’achat continuent de baisser. Si seulement le gouvernement pouvait tenir sa promesse de réhausse du guichet ouvert à 500 kWc, mais également revoir la formule d’adaptation de baisse trimestrielle des tarifs d’achat.… On pérenniserait alors notre marché national, ce qui nous permettrait de revenir dans nos objectifs vis-à-vis de la PPE.

 

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