Dès l’aéroport de Nouméa qui sera bientôt alimenté par une centrale solaire de 1,6 MWc et des ombrières de parking de 1,4 MWc, la Nouvelle-Calédonie affiche ses ambitions. L’île a en effet l’intention de devenir un modèle en termes de développement des énergies renouvelables, et notamment du photovoltaïque, dans le Pacifique Sud. « L’objectif est de devenir le DOM-TOM numéro un en termes d’énergies renouvelables et d’afficher le savoir-faire néo-calédonien dans les technologies avancées », souligne Boualem Benkoussa, directeur général d’Ambi Energy, société EPC calédonienne fondée en 2007.
En vertu de son statut indépendant, la Nouvelle-Calédonie décide de ses propres objectifs de développements des énergies renouvelables. Selon les termes de son Schéma pour la transition énergétique de Nouvelle-Calédonie (STENC) adopté en 2016, l’enjeu était donc de passer à 100 % d’énergies renouvelables sur la distribution publique d’ici à 2025. « En raison du fort développement du photovoltaïque, ce sera certainement le cas dès l’année prochaine », assure cependant Christopher Gygès, en charge de l’énergie au gouvernement néo-calédonien. En 2019, 32 MWc d’appels d’offres pour des centrales PV au sol ont été alloués. Sur 2020, 51 MWc ont été désignés, tandis que pour 2021, 10 MWc sur terres coutumières (appartenant à des tribus kanaks et qui ne peuvent être cédées) et 16 MWc au sol ont été instruits.
Convertir le secteur de la métallurgie au solaire
« L’autre enjeu se situe dans la transition du secteur de la métallurgie, poursuit Christopher Gygès. Trois usines de nickel, parmi les plus grandes dans le monde, représentent 75 % de la consommation électrique du pays ». Deux d’entre elles sont alimentées par une centrale du charbon et la dernière est équipée d’une centrale au fioul très chère et ancienne, qui fait actuellement l’objet d’une modernisation. Dans les deux, ces deux combustibles sont importés d’Australie et de Nouvelle-Zélande. C’est pourquoi le gouvernement calédonien va lancer une série d’appels à projets découpés en grandes tranches de 30 à 40 MWc, afin d’alimenter ce secteur en solaire à hauteur de 130 MWc dans les deux ans. « Le but n’est pas d’atteindre du tout photovoltaïque car il y a encore des problématiques de stockage, mais d’atteindre un mix PV-gaz », tempère Christopher Gygès. L’intérêt des industriels est également économique : « L’une des usines de nickel fournit des grands noms de l’automobile comme Tesla, BMW ou General Motors pour leurs batteries et ceux-ci sont intéressés par du nickel « vert », explique Christopher Gygès. Le photovoltaïque est donc un atout ».
Grâce à la présence d’un tissu économique fort et bien organisé, l’île de 287 000 habitants a aussi l’objectif de développer cette filière. « Nous voulons faire de la Nouvelle-Calédonie une île pionnière, mais pas seulement dans la production, insiste Christopher Gygès. Le gouvernement veut également développer la formation, de l’innovation et la R&D, avec des partenariats avec les Universités et grandes écoles sur des profils bac +5. En raison de l’industrie minière, nous avons longtemps été considérés comme un mauvais élève et nous voulons rattraper notre retard en termes d’image. D’autant que contrairement à d’autres territoires d’Outre-mer, nous avons beaucoup de place. Nous avons également des zones extrêmement ensoleillées, comme sur la côte ouest ».
L’ancrage des entreprises locales et des grands groupes
Il peut s’appuyer pour cela sur la présence des grands groupes ancrés sur ce territoire, tels que Engie, Akuo, Urbasolar, qui vient de s’implanter, ou encore TotalEnergies. C’est ce dernier qui développe la centrale PV sur l’aéroport de Nouméa qui produira 4 654 MWh/an. En plus de cette centrale, l’entreprise construit sur 2021 trois autres parcs : Hélio Koumac (5,7 MWc), Hélio Wabéalo (3,4 MWc) et Hélio Plaine de Gaïacs (6 MWc). « Cela portera à 12 fermes solaires et 73 MWc notre portefeuille de parcs, ce qui est important à l’échelle de la Nouvelle-Calédonie », souligne Stefan Sontheimer, directeur de l’agence Pacifique chez TotalEnergies. L’entreprise exploite notamment les centrales de Boulouparis (12 MWc) et de Boulouparis 2, qui la plus grande centrale photovoltaïque avec stockage de France, avec une puissance de 15,8 MWc et une capacité de stockage de 9,5 MWc, pour assurer la stabilité du réseau. L’île a surtout choisi de faire du stockage décentralisé. De son côté, Enercal, gestionnaire de réseau mais aussi société de production, travaille également sur de gros objets et mettra en service en août 2023 la centrale de Népoui. Visant à remplacer progressivement la centrale thermique Jacques Iekawé exploitée par Enercal, elle aura une puissance de 23 MW et sera selon l’entreprise la plus grande du territoire de par sa puissance de production.
« Nous avons su nous faire accompagner par des entreprises locales qui sont montées en compétences et qui sont capables de réaliser des chantiers à des prix compétitifs », poursuit Stefan Sontheimer. Parmi ces entreprises purement néo-calédoniennes, TotalEnergies travaille avec Ambi Energy, qui a installé 55 MWc sur le territoire. C’est cette entreprise qui se charge par exemple de la construction de la centrale de l’aéroport de Nouméa et de la centrale de Wabéalo.
Actuellement, selon le gouvernement, le coût du MWh en Nouvelle Calédonie se situe autour de 25 euros, un tarif bas si l’on prend en compte le fort ensoleillement mais surtout les particularités de cette île. « Sur le Capex et l’Opex, il faut compter un surcoût de 25 à 30 % par rapport à la Métropole », chiffre Stefan Sontheimer. « Il faut aussi prendre en compte un certain nombre de contraintes techniques, comme l’environnement cyclonique, les conditions climatiques rudes, avec le taux d’humidité élevé et la salinité », complète Boualem Benkoussa. Mais en dépit de ces difficultés, compte-tenu du développement rapide et de la volonté du gouvernement, les prix ont été divisés par huit en l’espace de dix ans.
A venir la semaine prochaine : La Réunion
Par habitude, on continue à parler de DOM-TOM (Départements d’Outre-Mer et Territoires d’Outre-Mer). Mais depuis une réforme constitutionnelle de 2003, on devrait en réalité parler de DROM (Départements ou Régions français d’Outre-Mer)-COM (Collectivités d’Outre-Mer). Les premiers réunissent la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, la Réunion et Mayotte. Les deuxièmes : la Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna, Saint-Martin et Saint-Barthélemy. En raison de leur politique affichée dans le développement du solaire, pv magazine a choisi de se focaliser sur la Nouvelle-Calédonie, la Réunion, la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane et Mayotte.
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