Les modules PV sur le marché spot de l’UE : chers aujourd’hui, encore plus chers demain

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D’après pv magazine international.

La flambée des prix des modules photovoltaïques n’est pas près de s’arrêter, si bien que les parties prenantes sont contraintes soit de reporter indéfiniment la construction de leurs projets photovoltaïques, soit, comme les clients du marchand ambulant de légumes susmentionné, de se procurer au plus vite le produit pour éviter de payer plus cher par la suite.

Les différences de prix observées entre des marques et des technologies de modules similaires sont en réalité conditionnées par les coûts de transport depuis l’Asie. Mais que s’est-il passé pour que les tenants des contrats d’approvisionnement à long terme soient devenus déraisonnables et que la sécurité de la planification ne soit qu’un bon souvenir ?

Tout a commencé avec la crise du Covid-19. Tout d’abord, les usines de production ont été paralysées, empêchant la circulation des marchandises nécessaires et urgentes. En parallèle, les porte-conteneurs ne fonctionnaient pas à plein régime et les livraisons ont subi des retards. Lorsque la production a repris, du moins en Chine, le virus avait déjà atteint les centres d’expédition. Les transitaires, les ports et les autorités douanières ne fonctionnaient alors qu’à capacité très réduite, si ce n’est pas du tout.

En cause : l’absence d’un grand nombre d’employé pour cause de maladie et la mise en quarantaine répétées de marins et de dockers. D’importants ports d’outre-mer ont même été fermés et bouclés pendant plusieurs jours. En raison de ces évènements créant de l’incertitude, les compagnies maritimes ont réduit leur activité afin de limiter les capacités inutilisées et les surcoûts côté expéditeurs.

Retour de la demande

C’est au moment où l’incertitude quant à l’évolution de la pandémie a commencé à se dissiper début 2021, que le chaos dans le flux mondial des marchandises a vraiment commencé. Encouragés par les fermetures des magasins et lieux publics et par le travail à domicile, les consommateurs ont manifesté le besoin d’améliorer leurs habitats et d’adopter un mode de vie plus durable. Alors, après une accalmie de plusieurs mois, la consommation a soudainement bondi dans les pays industrialisés, et l’industrie solaire a tout aussi bien été concernée par ce boom.

De nombreux acteurs en Allemagne ont d’ailleurs fait état de très bons résultats au premier semestre. Mais les compagnies maritimes et les transporteurs de fret n’étaient pas préparés à une augmentation rapide du volume des marchandises et fonctionnaient toujours en capacité réduite, de même que pour de nombreux prestataires de services et agences gouvernementales. En peu de temps, la demande de transport a largement dépassé l’offre. Les cargos se sont vus bloqués à l’extérieur des ports entraînant des délais de livraisons de marchandises au niveau international. On note une augmentation de ces délais de 20 à 30 % par rapport aux niveaux d’avant la pandémie.

En résumé, trop de marchandises attendent sur trop peu de navires dans le monde entier, et les chaînes logistiques ne fonctionnent pas comme elles le devraient. En conséquence, les tarifs de fret ont explosé depuis l’automne dernier. Alors qu’un conteneur de fret maritime entre la Chine et Rotterdam coûtait environ 1 500 à 2 000 dollars avant la pandémie, les prix sont aujourd’hui montés en flèche pour atteindre 15 000 à 18 000 dollars. En termes de capacité modulaire, la part du fret a été multipliée par dix, passant d’environ 0,004 à 0,006 €/W à 0,05 à 0,06 €/W. Les coûts de transport ne représentent donc plus seulement 2 % du prix total, mais jusqu’à 20 %.

Les fabricants chinois ont rapidement compris que des produits aussi coûteux ne se vendent plus en Europe. Dans certains cas, les quantités livrées sont réduites, et dans d’autres, les délais sont prolongés jusqu’à ce qu’un transporteur abordable puisse être trouvé. La dernière astuce en date consiste toutefois à transférer à l’acheteur le risque lié au fret pour les futures livraisons. Les marchandises ne sont plus proposées avec incoterms DDP ou CIF/FCA Rotterdam classiques qui incluent la livraison jusqu’au chantier ou à l’entrepôt, mais sur des termes EXW ou FOB, qui impliquent un départ de l’usine ou jusqu’au porte-conteneurs. Cela signifie que les augmentations de prix pour le transport sont entièrement à la charge du client, ce qui rend difficile, voire impossible, un calcul fiable du prix d’achat ou la possibilité de fixer une date de livraison ferme.

Peu de clients en bout de ligne acceptent d’assumer cette incertitude et cet état de fait est préoccupant d’un point de vue économique. Pour cela, je déconseille fortement d’accepter de telles conditions contractuelles, du moins tant que la situation du trafic et des capacités de fret reste aussi imprévisible. Des coûts élevés de transport ont un impact sur l’ensemble de la chaîne de valeur. L’augmentation constante des prix des matières premières et des produits semi-finis érode en ricochet les marges des fabricants et des détaillants. Lorsque ces coûts se répercutent sur les consommateurs, ils entraînent l’inflation. C’est un cercle vicieux que nous ne pourrons probablement briser qu’en augmentant la création de valeur au local et en réduisant le trafic international de marchandises.

À propos de l’auteur

Martin Schachinger est actif dans le domaine des énergies renouvelables depuis plus de 20 ans. En 2004, il a fondé la plateforme commerciale en ligne , où les grossistes, les installateurs et les entreprises de services peuvent acheter des composants standard, des modules solaires et des onduleurs qui ne sont plus fabriqués, mais dont on a encore besoin de toute urgence pour réparer des systèmes photovoltaïques défectueux.

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