Le paysage énergétique européen évolue, et la France se profile comme un acteur notable dans le domaine des contrats d’achat d’électricité (PPA) solaires pour les entreprises. Le marché a connu sa première vague d’accords d’achat d’énergie solaire pour les entreprises en 2019, avec un PPA de 25 ans contracté par la société de distribution Boulanger qui signait avec Voltalia pour 5 MW d’électricité verte. Récemment, cependant, une augmentation significative de ces contrats a été observée dans tout le pays. Enerdatics considère que la France n’est plus seulement un marché émergent, mais aussi un marché qui progresse rapidement en matière d’accords d’achat d’énergie solaire.
Nos données révèlent que le pays a enregistré 1,4 GW de PPA solaires depuis le début de 2021. Ce résultat place le pays en deuxième position après l’Espagne, qui occupe la première place dans le paysage des PPA en Europe. En outre, le rythme auquel l’activité PPA progresse en France lui a permis de dépasser plusieurs marchés d’Europe occidentale, dont l’Allemagne (1,1 GW) et le Royaume-Uni (500 MW), soulignant son potentiel de croissance future.
La hausse de la volatilité des prix et le développement des capacités : des leviers de croissance pour les PPA solaires
Historiquement, la France a bénéficié de prix de l’électricité stables, en grande partie grâce à sa dépendance à l’égard de l’énergie nucléaire. Les grandes entreprises industrielles et technologiques s’approvisionnaient en électricité auprès des compagnies d’électricité sans avoir besoin de se prémunir contre d’éventuelles fluctuations des tarifs. De même, les développeurs de projets ont profité de subventions du gouvernement français, telles que le système des contrats pour la différence (CfD), pour vendre l’électricité produite aux distributeurs d’électricité.
Cependant, la baisse spectaculaire du coût de l’énergie solaire au cours de la dernière décennie 2022, associée à l’invasion de l’Ukraine par la Russie et aux arrêts de maintenance prolongés des installations nucléaires, a entraîné un changement de paradigme dans le paysage énergétique. Ces circonstances ont entraîné une hausse soudaine des tarifs de l’électricité et ont mis en évidence la sensibilité de la matrice énergétique française à la volatilité des prix, attirant ainsi l’attention du marché sur les PPA solaires.
Conscients des avantages qu’ils présentent, de nombreux grands fournisseurs d’électricité en France ont commencé à s’orienter vers un modèle centré sur les PPA, qu’ils considèrent comme un moyen stratégique de faire face aux incertitudes de la tarification de l’électricité à long terme et d’assurer un approvisionnement régulier. Pour les développeurs de projets solaires, cette évolution a constitué une alternative intéressante aux voies traditionnelles d’accès au marché, leur permettant de conclure des contrats bilatéraux à des conditions mutuellement avantageuses.
Cette transition a été renforcée par des obligations réglementaires plus strictes en matière de décarbonisation et par la pression exercée pour réduire les factures d’électricité, ce qui a incité plusieurs entreprises à signer des PPA afin d’atteindre leurs objectifs écologiques et d’accroître leur rentabilité.
Les acheteurs industriels dominent l’activité ; le commerce de détail et les secteurs technologiques rattrapent leur retard
Le secteur industriel a été à l’avant-garde du mouvement des PPA en France, porté par la contrainte de réduire les émissions et pour appuyer la croissance future sur l’énergie propre. Depuis le début de l’année 2021, les entreprises industrielles ont signé environ 800 MW de contrats d’achat d’énergie solaire, principalement pour des projets à des stades avancés de développement. Parmi ces accords figurent le contrat de 15 ans du Groupe Renault pour l’achat de 350 MW d’énergie solaire, celui de l’opérateur ferroviaire SNCF (260 MW), de la société minière Prony Resources (160 MW) et de l’entreprise automobile Faurecia (100 MW). La majorité de ces contrats sont d’une durée de 15 à 25 ans. Avec l’augmentation continue de la demande d’énergie, le secteur industriel devrait conserver sa position de leader sur le marché.
Les efforts récents du gouvernement, y compris via la création récente d’un fonds de garantie en collaboration avec Bpifrance, sont destinés à protéger à la fois les acheteurs et les fournisseurs industriels des risques typiques associés à ce type d’accords. Le but est de promouvoir un accès plus large à l’énergie propre par le biais d’accords d’achat d’électricité, en particulier pour les petits développeurs et les acheteurs commerciaux et industriels dont la cote de crédit peut être plus faible.
Le secteur de la distribution en France a fait des progrès notables sur le marché des PPA, en signant plus de 200 MW d’énergie solaire depuis 2021, dont une grande partie au cours de l’année écoulée. Des acteurs majeurs, dont Les Mousquetaires (avec 124 MW), E.Leclerc (avec 31 MW), et L’Oréal (avec 27 MW), ont conclu des contrats d’achat cette année, ouvrant ainsi la voie à d’autres enseignes de la distribution. Étant donné que les nouveaux projets solaires offrent de nouvelles perspectives de PPA et que la demande de sources d’énergie propres reste stable, le secteur de la distribution devrait établir une présence significative sur le marché dans les années à venir.
Le secteur technologique devrait également avoir un impact significatif sur le marché français des PPA solaires en raison de son implantation croissante dans le pays qui s’accompagne d’une augmentation des activités à forte consommation d’énergie. Des entreprises comme Digital Realty, Telehouse et Data4 Group ont par exemple annoncé leur intention de construire de nouveaux centres de données, lesquels nécessiteront une alimentation électrique constante et substantielle – un élément qui pourrait se traduire par une augmentation des PPA.
Défis, perspectives d’évolution et prévisions
Bien que la France possède les éléments fondamentaux pour être un leader dans les années à venir, plusieurs défis doivent être surmontés pour réaliser pleinement ce potentiel. L’un des principaux obstacles est le manque d’accords d’achat d’électricité accessibles aux petites entreprises. Alors que les grandes entreprises peuvent facilement conclure des contrats à long terme grâce à leurs ressources financières, les petites entreprises rencontrent des difficultés en raison de leur capacité limitée et de leur avenir incertain. En outre, les petits développeurs de projets solaires n’ont pas le soutien financier des grandes entreprises, et il leur est donc plus difficile de conclure des contrats d’achat d’électricité avec les grands comptes.
Cependant, Enerdatics émet des perspectives positives, suggérant que les PPA pourraient jouer un rôle important dans l’avancement des ambitieux plans d’expansion de l’énergie solaire en France. Cet optimisme s’appuie sur les récents ajustements politiques du gouvernement français, tels que le projet de loi sur l’accélération des énergies renouvelables, qui fournit un cadre juridique pour la conclusion d’accords d’achat d’électricité, un processus qui n’était pas réglementé auparavant. Ce cadre impose une autorisation administrative aux producteurs souhaitant vendre de l’électricité et ouvre la possibilité de coupler les PPA avec des programmes d’aide financière publique. En outre, la législation permet désormais aux entités publiques de conclure des PPA dans le respect des règles relatives aux marchés publics et clarifie la compatibilité des PPA à long terme avec l’article L.2112-5 de la loi sur les marchés publics, qui limitait auparavant la durée des contrats en fonction de la nature du service et de la nécessité d’un appel d’offres régulier. Ces modifications législatives jettent les bases d’un marché des PPA plus robuste.
Bien que ces changements ne garantissent pas à eux seuls une croissance constante, Enerdatics pense qu’ils encourageront les principales institutions financières à soutenir les projets à subvention zéro et faciliteront l’obtention de contrats d’électricité à long terme par les acheteurs. En conservant un optimisme prudent, il semble que le paysage devienne plus propice à la croissance envisagée par les acteurs du secteur.
A PROPOS DES AUTEURS
Hari Krishnan, Kshitij NR et Mohit Kaul sont respectivement analyste senior, chef de produit et fondateur d’Enerdatics.
Enerdatics est une plate-forme d’intelligence de marché qui fournit des données, des informations et des analyses sur les transactions d’énergie renouvelable. La société propose des ensembles de données exhaustifs sur les fusions et acquisitions, les financements et les contrats d’achat d’électricité (PPA), complétés par des données granulaires sur les projets d’énergie renouvelable. Ceux-ci sont intégrés dans une base de données d’analyse à destination des équipes de stratégie d’entreprise et de fusions et acquisitions, les conseillers, les banques d’investissement et les sociétés de capital-investissement.
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