La centrale de Générale du Solaire au Cameroun progresse… même sans subvention

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GDS Orion Solaire vient de signer la convention avec l’agence de promotion des investissements (API) pour le développement de sa centrale de 20 MW à Ngaoundéré au Cameroun, une localisation très ensoleillée et proche du réseau électrique. « Il fallait faire une centrale dans le réseau nord du pays car il y avait déjà beaucoup de projets développés dans le sud, notamment hydroélectriques. » explique Antoine Huard, le directeur du développement de Générale du Solaire.

Les premières réflexions liées à ce projet ont débuté au Forum EMA Invest à Genève en 2013.  Depuis, le Cameroun a connu une période de grosse restructuration du secteur de l’électricité – la Sonatrel a été créée (gestionnaire du réseau de transport de l’électricité, équivalent de RTE en France), la licence de la compagnie Eneo qui gère la distribution et la production d’électricité a dû être renouvelée… « Tant que la licence n’était pas renouvelée, il n’était pas possible d’avancer sur les projets où Eneo devait racheter l’électricité », déclare Antoine Huard. Si tout se passe comme prévu, l’ensemble des droits et des licences seront obtenus d’ici la fin de cette année, et la construction pourrait alors débuter l’année prochaine.

L’investissement est estimé à 22,9 millions d’euros (15 millions francs CFA). Générale du Solaire ne se fait pas de souci concernant le financement : « On a de nombreuses lettres d’intérêt et d’engagements, conditionnés bien entendu à l’obtention des droits et contrats nécessaires. »

De nombreux investisseurs, bailleurs et prêteurs disposent d’importantes liquidités et recherchent ce type de projet. « Contrairement à ce que les gens pensent, ce qui manque ce n’est pas l’argent », explique Antoine Huard. Il y aurait énormément d’argent disponible dans le monde pour financer ce type de projet d’infrastructure en Afrique, « ce qui manque ce sont des projets finançables, c’est-à-dire des projets qui ont rempli l’ensemble des conditions nécessaires pour que les prêteurs acceptent de verser l’argent. C’est un constat que l’on fait tous. »

Le financement de projet : subventionné vs non subventionné

Pourquoi serait-il difficile de trouver de tels projets ? « Monter un projet, cela représente un risque que peu de gens sont prêts à prendre. Cela fait cinq ans que l’on travaille sur ce projet, et s’il ne se concrétise pas finalement, il n’y aura personne pour nous rembourser. »

Antoine Huard a coordonné l’élaboration de la note Énergie solaire en Afrique : un avenir rayonnant ? sur la solarisation de l’Afrique, publié en février par l’Institut Montaigne. Il y explique notamment que le marché subit une concurrence artificielle due aux subventions accordées à certains projets. Les développeurs courent le risque — après avoir investi de l’argent dans différentes démarches liées aux études, au terrain et aux contrats — de voir leur projet être abandonné si un projet subventionné voit le jour dans une région proche en cours de route. « Ce projet subventionné produira une électricité à moindre coût. Les pouvoirs publics se désintéressent alors du projet non subventionné pour s’engager pour le projet subventionné, explique M. Huard. C’est probablement le risque le plus important auquel font face les développeurs aujourd’hui. »

Cela a par exemple été le cas en Zambie, où un projet subventionné dans le cadre de l’initiative Scaling Solar menée par la Société financière internationale (SFI), une filiale de la Banque mondiale, a proposé un prix de 6 ct US/kWh, un prix trois fois inférieur au prix du marché de l’époque. « Donc, à cause de cet écart de prix, un certain nombre de projets qui étaient sur le point de se concrétiser ont été mis en stand-by ou abandonnés. C’est donc une concurrence contre laquelle nous nous élevons. » De même, au Sénégal, également dans le cadre de la subvention Scaling Solar, une centrale peut offrir un prix de 3,8 ct/kWh, un prix qu’un développeur privé ne peut pas obtenir sans subvention.

Le programme Scaling Solar propose non seulement des subventions sur le financement, mais offre aussi des garanties ou facilite l’accès à des études, au terrain ou au raccordement.

Par ailleurs, les projets subventionnés communiquent sur leurs prix très bas, ce qui sème le trouble auprès des décideurs publics. « C’est un problème politique : il est délicat pour un décideur politique local d’assumer le fait de mener des projets non subventionnés plus chers en courant le risque de se faire accuser d’avoir mal fait. »

Bien qu’il salue le travail de la Banque mondiale par ailleurs, Antoine Huard rappelle que la SFI ne dispose pas des ressources suffisantes pour répondre aux besoins en électricité de 600 millions de personnes, et surtout de répondre à ces enjeux dans l’urgence. « Ce n’est pas en subventionnant quelques projets ici ou là qu’on va arriver à subvenir au besoin des 600 millions de personnes qui n’ont toujours pas accès à l’électricité en Afrique. Il faut créer un “vrai” marché, avec des développeurs privés qui vendront l’électricité au “vrai prix”. »

Pour conclure, il souligne toutefois qu’il est très heureux que les autorités publiques camerounaises aient vu que l’atout et l’importance du projet proposé par GDS Orion Solaire soient sa réplicabilité : ne bénéficiant d’aucune subvention, il pourra être dupliqué ailleurs dans les mêmes conditions, « au vrai prix du marché, qui est déjà très inférieur au prix de l’électricité thermique produite par des groupes électrogènes ou des centrales au fioul. »

Générale du Solaire a plusieurs projets en Afrique, notamment en Afrique de l’ouest. La centrale du Cameroun est l’une des plus avancées, celle du Ghana, de 50 MW, est la plus grande. Le portefeuille total de projets s’élève à 500 MW dans toute l’Afrique, mais seuls 300 MW sont dans une phase avancée.

 

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