La Commission du développement durable retoque Boris Ravignon à la présidence de l’Ademe

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C’est une première pour l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) : le candidat nominé à la tête de l’institution publique par le Président de la République a été retoqué par les Parlementaires ce mercredi 12 avril 2023. La commission du développement durable s’est réunie hier pour l’audition de Boris Ravignon, proposé aux fonctions de président du conseil d’administration de l’Ademe.

Pour rappel, le maire (élu sous la bannière Les Républicains) de Charleville-Mézières dans les Ardennes assurait l’intérim de la présidence de l’Ademe depuis décembre 2022. Il avait été nominé par Emmanuel Macron à la suite de la démission d’Arnaud Leroy. Le Parlement et le Sénat s’étaient alors déjà exprimés majoritairement contre cette nomination, sans toutefois réunir les 3/5 de voies nécessaires au retoquage.

La nouvelle audition d’hier entérine le rejet de la candidature de Boris Ravignon, conformément à la compétence du parlement sur ce sujet, introduite en 2008 à l’article 13 de la Constitution. « Ce vote traduit le mécontentement du Parlement devant une telle impréparation, nouvelle manifestation du manque de considération de l’exécutif à son égard », a déclaré le Sénat dans un communiqué, marquant son indignation face à l’appui de l’exécutif sur cette candidature qui n’avait pas convaincu.

Cumul des mandats, position pro-nucléaire et mauvaise anticipation des missions

Boris Ravignon assure les fonctions de maire de Charleville-Mézières et de président de la Communauté d’agglomération Charleville-Mézières / Sedan. Malgré sa démission à la vice-présidence de la Région Grand Est, sa volonté de cumuler plusieurs mandats a joué en sa défaveur. Les parlementaires estiment en effet que les fonctions occupées méritent un investissement complet, en particulier dans un contexte de crise. Les députés du Rassemblement National (RN) Emmanuel Blairy et Nicolas Dragon ont particulièrement insisté sur ce point au cours de l’audition.

En effet, les arguments reposent sur l’importance de l’action de l’Ademe, dont le budget passe notamment à 4,4 milliards en 2023. Dans un contexte de crise (énergie, inflation) où les citoyens ont besoin de leurs élus locaux, mais aussi pour des considérations géographiques, il paraissait difficile, voire impossible, pour les élus d’être investi à hauteur acceptable sur les deux pans. Aux interrogations des parlementaires, le candidat a répondu qu’il tirait de la force de son ancrage local et qu’il continuait d’assurer ses mission de maire et de président d’agglomération lors de « permanences le weekend », ce qui n’a pas convaincu.

La position pro-nucléaire du candidat a également posé question. La feuille de route de l’Ademe en matière d’énergie verte est ambitieuse avec un objectif de 85 % d’électricité renouvelable (et non décarbonnée) en 2050. L’entrain de Boris Ravignon sur l’installation d’EPR dans son département et son soutien aux politiques de développement nucléaire fait douter sur les efforts qu’il serait en mesure de déployer pour développer efficacement les énergies renouvelables, dont le solaire et l’éolien. « Le nucléaire fait clairement partie des options énergétiques qui sont posées », a répondu le candidat qui a soutenu la complémentarité des deux développements. Pour rappel un rapport présenté jeudi 6 avril dernier par la commission d’enquête de l’Assemblée Nationale a appelé à une programmation sur trente ans et une relance du nucléaire. « Si les nouveaux EPR sont construits, ils ne seront pas tout de suite disponibles », a rappelé Boris Ravignon qui a dit vouloir faire travailler les équipes de l’Ademe sur le développement d’énergies décarbonnées sans positionnement idéologique.

Les autres questions des parlementaires ont notamment porté sur l’accompagnement de l’Ademe dans l’instruction des dossiers pour le Fonds Vert (deux milliards d’euros), la suffisance de ces enveloppes d’aides aux collectivités, la pertinence du fléchage de l’accompagnement (crainte que les petites collectivités n’accèdent pas correctement aux aides de l’Etat) et la compréhension des différents leviers d’action pour la transition énergétique. La superficialité des réponses du candidat a été mal accueillie, en particulier au vu des responsabilités grandissantes de l’Ademe, notamment dans sa capacité d’investissement.

Pour rappel, l’Ademe s’est dotée d’un levier de financement interne en 2018. Dans le cadre du programme d’investissements d’avenir, l’agence a créé Ademe Investissement, une société détenue à 100 % par l’État qui finance des projets innovants d’infrastructure dans le domaine de la transition énergétique, aux côtés d’investisseurs privés.

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