Acteur de la semaine : Rosi Solar lance l’industrialisation de sa technologie de recyclage

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Le recyclage des panneaux solaires est un enjeu économique et environnemental de premier plan, qui va bientôt devenir d’actualité brulante avec la fin de vie annoncée d’un panel d’installations PV en Europe et dans le monde d’ici les prochaines années. En ce qui concerne la France seule, les besoins en recyclage pourraient être de 150 000 tonnes d’ici 2030, selon l’éco-organisme chargé du recyclage des panneaux solaires Soren (ex-PV Cycle France).

Poussée par cet état de fait et concentrée sur la recherche scientifique, la société grenobloise Rosi Solar a développé des solutions innovantes pour recycler et revaloriser les matières premières de l’industrie photovoltaïque. Dans le détail, la jeune pousse a mis sur pieds une technologie de rupture thermique et chimique permettant de récupérer le silicium ultra-pur et les autres métaux perdus lors de la production des cellules photovoltaïques et à la fin de vie des panneaux solaires.

Un processus de séparation thermique et chimique avancé pour recycler les matériaux à haute valeur de l’industrie PV

Rosi Solar a été lancé en 2017 au sein de l’incubateur Linksium. Depuis la jeune pousse a retenu l’intérêt de nombreuses sociétés et institutions qui la soutiennent désormais : l’Ademe, bpifrance, Veolia et des programmes de l’Union européenne notamment. En effet, s’il existe déjà plusieurs sites de recyclage mécanique des modules solaires en Europe portant principalement sur les cadres, les boitiers ou encore le verre, la technologie de séparation thermique et chimique utilisée par Rosi Solar est inédite et permet de créer de la valeur non négligeable à la fin de vie d’un module.

Le procédé de pyrolyse permet d’isoler les différentes factions de métaux des cellules. « L’argent représente moins de 0,1% des composants d’un module solaire, mais il constitue près de la moitié de sa valeur » a expliqué Yun Luo, cofondatrice et présidente de Rosi Solar à pv magazine. Il en va de même, dans une moindre mesure, pour le silicium, le cuivre ou encore le verre lorsqu’il est de qualité supérieure – ou plutôt de haute pureté. « Le recyclage avancé des panneaux représente un investissement, mais notre procédé innovant permet de séparer les métaux et les cellules de façon à conserver la pureté du matériau et donc sa valeur. »

Côté innovation, Rosi Solar a travaillé sur deux niveaux principaux. Tout d’abord, sur la mise au point d’un traitement thermique et chimique doux permettant d’extraire les métaux et matériau à haute valeur. Puis sur le procédé (désormais breveté) de réintégration du silicium dans les industries. Soutenu par l’Ademe pour la preuve de concept, la jeune entreprise a combiné des procédés du CNRS avec les résultats de sa propre recherche pour mener à bien la purification du silicium. « Notre premier projet portait sur la qualité du silicium récupéré dans les chutes résultantes de la découpe des wafers », explique Dre. Yun Luo. En 2019, le deuxième projet d’extraction a été réalisé en collaboration avec Veolia pour la preuve de concept et avec l’Ademe pour le cofinancement du prototype industriel.

Le déploiement industriel

Les clients de Rosi Solar sont les utilisateurs de ces matériaux, notamment dans l’industrie chimique. Après plusieurs années de recherches et de collaborations, la société passe aujourd’hui au déploiement industriel de sa solution de recyclage à faible impact environnemental. Avec les acteurs nationaux et, souvent, au sein d’initiatives européennes, elle vise à valoriser ses technologies de purification du silicium et de l’argent des cellules PV usagées de manière à créer un marché autour de la récupération des matériaux de haute pureté dans l’industrie solaire.

En France, sa technologie de rupture, associée aux services de logistique et de pré-traitement d’Envie 2E Aquitaine, a été retenue par Sorem en juillet 2021 dans un appel d’offres pour revaloriser les modules photovoltaïques (PV) en fin de vie. Dans sa nouvelle usine de La Mure en Isère, la société traitera les laminés sans verre pour en extraire le silicium et les métaux. « C’est notre premier gros contrat commercial » se réjouit Yun Luo qui précise que la construction du site a débuté en juillet 2021 pour une mise en service prévue d’ici le quatrième trimestre 2022. A terme l’usine pourrait recycler environ 3000 tonnes de panneaux solaires par an, ce qui correspond à environ 3 tonnes d’argent et 90 tonnes de silicium.

Joris chargeant un four de pyrolyse.

Image : Rosi Solar

En Allemagne, Rosi Solar participe au projet ReProSolar, mené par la filiale de Véolia en Allemagne, avec la participation de Flaxres, Evonik, Technalia, et le CNRS, qui vise à séparer pour la première fois tous les composants des module PV afin de démontrer l’enjeu du recyclage à haute valeur ajoutée de panneaux solaires à l’échelle industrielle. L’UE soutient notamment le projet avec un apport de 4,8 millions d’euros via l’EIT Rawmaterials.

« Nous sommes au début d’un tsunami en ce qui concerne le marché du recyclage », explique Yun Luo qui prévoit une croissance soutenue du secteur en Europe sur les vingt à trente prochaines années. Lauréat de l’European Innovation Council (EIT) Greendeal en 2020, Rosi Solar a notamment reçu un financement en subvention et en prise de participation qui pourra lui permettre d’investir dans ses sites allemand et français et de continuer le développement de ses technologies innovantes. « Au niveau du développement continu, nous voulons améliorer la R&D, notamment pour l’intégration des procédés et l’automatisation des opérations », explique Yun Luo. « Par la suite nous visons aussi à développer la réutilisation des matériaux recyclés sur de nouveaux marchés, à augmenter le tonnage de notre activité et à mettre en service des sites de plus en plus grands, intégrés et automatisés, en Europe, puis à l’international ».

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