Repowering : un important gisement photovoltaïque encore freiné par un cadre flou

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Qu’est-ce que le repowering ? Faut-il un nouveau permis de construire ? Peut-on candidater à un nouvel appel d’offres ? Autant de questions qui ont été soulevées lors d’une table ronde passionnante organisée sur le salon Energaïa à Montpellier le 11 décembre. « Le repowering consiste à optimiser une centrale photovoltaïque existante en remplaçant d’anciens modules par des modèles plus performants », rappelle d’emblée Antoine Laforgue, directeur général de Feedgy, entreprise qui a déjà mené plus de 400 opérations de ce type, en toiture comme au sol, principalement pour des exploitants agricoles.

Tandis que la puissance de la centrale ne peut pas être augmentée au-delà de 10 %, pour des raisons de raccordement, l’amélioration du rendement permet malgré tout de réduire de 30 à 35 % la surface occupée par les panneaux par rapport à une installation d’il y a dix ans. « Cette place libérée peut accueillir une nouvelle centrale PV, éventuellement associée à un système de stockage », poursuit-il. Le repowering crée ainsi un gisement de production supplémentaire sans extension foncière.

32 000 panneaux PV changés

Ces opérations interviennent souvent à la suite de sinistres (incendie, grêle) ou de défauts de qualité. BayWa r.e., qui exploite 11 GW de centrales en propre ou pour des tiers, a même créé un poste dédié, occupé par Jean-Baptiste Tustes, responsable Repowering et revamping : « C’est un marché en structuration. Nous devons identifier des solutions lorsque certains composants causent une perte de production détectée par les onduleurs », assure-t-il.

Chez Luxel, la situation s’est révélée plus critique. « Sur l’un de nos parcs de 7,8 MW mis en service en 2013, des défauts d’isolement sont apparus après seulement quelques années », explique Alain Konrath, son directeur exploitation et maintenance. L’entreprise créée en 2008 à Montpellier dispose aujourd’hui de 2 GW de pipeline en développement, 350 MW en cours de construction, 500 MW en exploitation et maintenance, dont les deux tiers sont propres et les autres pour compte de tiers. « Généralement, ces défauts viennent des câblages, mais dans notre cas, nous nous sommes vite aperçus qu’ils venaient de la face arrière des panneaux qui comportait des microcracks et des microfissures, faisant pénétrer l’humidité », décrit-il. Au début, le fabricant de modules propose de remplacer les plus atteints, mais il s’avère que toute la centrale est touchée : les 32 000 panneaux sont donc remplacés, à ses frais, par de plus récents.

« Si nous avons dû changer les 128 onduleurs de 50 kW, nous avons pu conserver le câblage et les structures, car nous avons volontairement choisi des panneaux PV de même dimension, même si la puissance unitaire a augmenté », souligne Alain Konrath. Pour autant, ces cas soulèvent aussi des questions, d’ordre juridique et organisationnel. « C’est un chantier plus complexe qu’un neuf : il faut essayer de conserver une partie du matériel. De plus, les travaux se font tranche par tranche pour conserver une partie de la production de la centrale », observe-t-il.

Redéposer un permis de construire ?

Et qu’en est-il du permis de construire ? « Pour l’instant, les DDT n’ont pas toutes la même interprétation, et une harmonisation serait bienvenue », reconnaît l’avocate Hélène Maigne. Tant que l’emprise et les fondations restent inchangées, et que l’aspect visuel est similaire, l’absence de nouvelle autorisation d’urbanisme pourrait être envisagée. L’avocate conseille toutefois de toujours solliciter la DDT, car cette incertitude risque de poser problème au conseil de banque et susciter des doutes pour le financement de la nouvelle centrale. Jean-Baptiste Tustes confirme : « Lorsqu’un retrofit implique de nouveaux postes de transformation ou des onduleurs supplémentaires, un nouveau permis s’impose. Si l’aspect extérieur ne change pas, l’analyse reste plus floue ».

Il en est de même pour les études d’impact. « Celles réalisées il y a dix ou quinze ans étaient bien moins détaillées. On ne peut pas toujours s’y référer pour un projet remanié », note l’avocate. Par ailleurs, la biodiversité a pu évoluer depuis la mise en service initiale. « La dérogation “espèces protégées” porte sur le chantier lui-même, qui entraînera forcément un impact, même si la centrale reste implantée dans ses limites d’origine ».

Enfin, la candidature de la nouvelle section de centrale à un appel d’offres de la CRE soulève également des questions : les équipements réutilisés doivent-ils être garantis pour toute la durée du nouveau contrat ? Faut-il un nouveau bail foncier ou un simple avenant ? Pour Antoine Laforgue, le repowering prépare de toute façon à la phase post-tarifs d’achat : « Il offre une réelle opportunité d’intégrer du stockage sur l’espace libéré. C’est un double gain : les batteries réduisent les besoins de raccordement et améliorent le pilotage de la production ».

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