Baywa re : « Nos projets photovoltaïques flottants de grande capacité sont déjà très compétitifs »

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« Tout est allé très vite », explique Benoît Roux, le directeur des activités solaires de Baywa re en France, à pv magazine. Baywa re est entré dans le solaire flottant suite à l’acquisition du développeur hollandaise GroenLeven en 2018. Celui-ci disposait d’un portefeuille de projets flottants déjà important, dont certains étaient déjà très matures et avancés. « Certaines centrales devaient être construites très rapidement », explique Benoît Roux. Les équipes de Baywa re examinent alors les solutions techniques disponibles sur le marché encore naissant du solaire flottant, au niveau international. Le benchmark n’est cependant pas concluant : « aucun système clé en main ne répondait aux standards techniques et de qualité de Baywa re en termes de photovoltaïque à grande échelle. C’est pourquoi nos équipes se sont mises à développer, à partir d’une feuille blanche, un nouveau système photovoltaïque flottant en s’entourant d’un réseau de partenaires industriels, dont certains avec lesquels nous avions déjà de longues années de coopération, notamment sur des projets au sol. »

La technologie propriétaire de Baywa re

Les problèmes de stabilité, d’ancrage, l’architecture électrique…, les points de critique envers les technologies existantes du solaire flottant sont nombreux. « L’organisation globale des systèmes ne permettaient pas d’obtenir une réelle optimisation des coûts de construction », résume Benoît Roux.

Fort de cette analyse, Baywa re met au point sa propre technologie. Celle-ci dispose d’un nombre de flotteurs par panneau réduit par rapport aux solutions de la concurrence. Reliés par une structure métallique, les flotteurs sont également plus grands et plus espacés les uns des autres, offrant à l’ensemble du système une stabilité plus importante.

Sur cette structure, les modules ont une orientation est-ouest et sont inclinés à 12 %, explique le directeur des activités solaires de Baywa re France. Contrairement à d’autres systèmes orientés plein sud, cela présente plusieurs avantages. « D’une part, les effets d’ombrage d’un panneau sur l’autre sont réduits, cela permet d’installer une puissance plus importante pour une même surface ». Le ratio que présente le système s’élève à un peu plus d’1,5 MW pour 1 hectare, alors qu’il s’élève à 1 MW environ pour 1 hectare sur les systèmes conventionnels. D’autre part, la stabilité est renforcée et la résistance aux vents meilleure puisqu’il y a très peu d’espace sous le système où les vents pourraient s’engouffrer. Cela permet d’éviter les effets de décollement. « Les vents dominants en Europe occidentale permettent au contraire de plaquer cette structure solaire à la surface de l’eau plutôt que de la décoller. »  Un autre avantage offert par cette inclinaison est une meilleure maitrise des ancrages, au niveau des berges ou au niveau du fond. « L’orientation spécifique est-ouest nous permet d’apporter des optimisations sur le dimensionnement des ancrages et donc des coûts. »

La technologie de Baywa re, qui a par ailleurs reçu le prix « pv magazine top innovation » en mars dernier, limite les impacts sur la faune et la flore subaquatiques. « La couverture de l’eau est réduite puisque les flotteurs sont plus espacés. C’est important pour permettre une meilleure circulation de l’eau et éviter les eaux stagnantes entre les flotteurs. Cela évite également le développement d’algues, qui pourraient perturber l’équilibre des écosystèmes », explique Benoît Roux. L’espacement des flotteurs donne aussi lieu à une meilleure pénétration de l’air dans l’eau, sous les panneaux, ajoute-t-il. De plus, un gain substantiel d’eau économisée par limitation de l’évaporation est réalisé. « Les premières études menées à ce sujet évaluent à près de 70 % les économies d’eau perdue par évaporation lorsque le bassin est couvert par un tel système », précise Baywa re.

50 MW installés en 12 mois

En l’espace de deux ans, Baywa re a finalisé sa technologie flottante et enchaîné les réalisations aux Pays-Bas : du projet pilote de 2 MW à Weperpolder, à l’actuelle plus grande centrale solaire flottante du pays, à Bomhofsplas, d’une capacité de 27,4 MW, la société a été propulsée au rang de « leader du photovoltaïque flottant en Europe ». Elle atteint également des temps de construction records : six semaines seulement pour construire la centrale de Sekdoorn de 14,5 MW, 7 semaines pour la centrale de Bomhofsplas.

Comment Baywa re peut-il tenir des délais aussi courts en regard des puissances installées ?

« Nous avons un système de montage très optimisé : les systèmes de « bateau » avec quatre flotteurs rassemblés par la structure métallique sont assemblés à la chaîne sur une plateforme sur la berge du lac. Tous ces « bateaux » sont ensuite assemblés les uns aux autres puis glissés dans l’eau et amenés à l’endroit prévu du plan d’eau en étant simplement tractés par quelques zodiacs », explique Benoît Roux.

« Notre dernier projet de 27,4 MW à Bomhofsplas a résisté à des tempêtes en phase de construction, qui sont des phases un peu plus critiques, et tout s’est très bien passé, comme en témoigne la rapidité de l’achèvement de ce parc », souligne-t-il.

Des coûts en baisse

Aujourd’hui, ce secteur est certes un créneau de niche, dont les coûts sont plus élevés que les projets solaires conventionnels, telles que les centrales au sol — de 20 à 25 % déclarait Benedikt Ortmann le président de BayWa en novembre dernier –, pourtant « en ayant déjà installé 50 MW, on a constaté des baisses de coûts assez spectaculaires, des coûts de construction notamment », déclare Benoît Roux. « Demain, quand on aura installé 100 MW, 500 MW, voire quand on aura dépassé la barre du GW, ce que l’on pressent de manière assez certaine, on aura des gains d’échelles encore plus significatifs. Ils nous permettront d’atteindre un niveau de compétitivité comparable à d’autres technologies que l’on déploie aujourd’hui plus massivement, en France en particulier. »

Baywa déclare être déjà compétitif sur des projets flottants de très grande taille, à savoir de plus de 20 MW ou 30 MW, en particulier sur des latitudes du sud. Le coût actualisé de l’énergie (LCOE) devrait encore baisser dans les 2 ou 3 prochaines années, lorsque les effets d’échelle seront réalisés.

Perspectives

« En France, il y a un potentiel très intéressant pour le photovoltaïque flottant », déclare Benoît Roux. Cette technologie peut répondre à des débats sur le conflit d’usage, ajoute-t-il, puisqu’elle permet de valoriser des plans d’eau artificiels issus d’exploitations de carrières, très fréquents dans certaines régions. Ce sont des espaces inexploités et perdus, qui sont, à l’heure actuelle, générateurs de charges et de contraintes pour leurs propriétaires.

« La mise en service de la première centrale photovoltaïque flottante de Baywa re peut être envisagée en 2023-2024, en ce qui concerne des projets de notre portefeuille », précise Benoît Roux. La société examine toutefois plusieurs voies pour se développer sur ce marché : elle peut proposer une construction clé en main, avec sa technologie, à des porteurs de projets déjà lauréats des appels d’offres CRE ou qui disposent déjà des autorisations nécessaires. Elle envisage aussi l’acquisition de projets que des développeurs ne pourraient pas achever.

En termes de chiffres, d’ici fin 2020, Baywa re prévoit de construire 100 MW de solaire flottant supplémentaires aux Pays-Bas. Une centrale de 40 MW devrait d’ailleurs entrer en construction dans les prochains mois dans la province de Drenthe, au nord du pays. Ses installations solaires flottantes cumuleront alors une capacité de 150 MW d’ici début 2021.

Son portefeuille de projets en développement à l’échelle européenne est estimé à 500 MW. « Les activités se concentrent particulièrement aux Pays-Bas, en France, en Allemagne et en Espagne. » Ensuite, le développeur envisagera l’Italie et la Grèce, où il prévoit même de se passer des mécanismes de rémunération des États et de mettre en place des PPA (power purchase agreement). « Avec la compétitivité du LCOE, il sera également possible de signer des PPA en France. À court terme, ce sera vraisemblablement dans le cadre des appels d’offres de la CRE que les projets seront réalisés, mais la finalité est de s’affranchir de toute subvention publique et de pouvoir conclure des PPA sur les projets flottants comme au sol », conclut Benoît Roux.

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