Révision des tarifs d’achat solaire avant 2011 : vague de réactions

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Si le SER (Syndicat des énergies renouvelables), « en accord avec les acteurs de la filière solaire, ne souhaite pas réagir à des information encore non-avérées et trop générales en l’état » et précise étudier « activement ces éléments sur le fond » pour se positionner « s’ils étaient avérés, à la hauteur des enjeux soulevés », Enerplan réclame, dans un communiqué une rencontre avec la ministre de la transition écologique, Barbara Pompili.

« Un rendez-vous en urgence à la ministre chargée de l’énergie pour faire le point sur un projet qui serait inquiétant pour la transition énergétique et la relance économique », indique Enerplan. Daniel Bour, son président précise que « cette information me paraît inconcevable : nous n’avons jamais été informés de ce projet de remise en cause de la parole et de la signature de l’Etat. Je demande, au nom de la profession, à la ministre de la Transition Écologique de nous recevoir dans les plus brefs délais. »

Interrogé par pv magazine, Xavier Daval, le président de kilowattsol (par ailleurs président de la commission solaire du SER), s’étonne. « Faute d’avoir été capable de proposer la moindre initiative dans #FranceRelance pour positionner notre pays dans la grande aventure solaire mondiale, les moyens de l’Etat sont maintenant mobilisés pour s’attaquer, rétroactivement, aux contrats d’achats conclus avant le moratoire de 2010. Nos dirigeants ont visiblement tout compris à la relance verte. En reniant sa parole, l’état Français va rejoindre l’Espagne, l’Italie ou la République Tchèque au banc des apostats. » Et le responsable d’ajouter que : « Quand en 2020 Elon Musk envoie une fusée dans l’espace pour 2 millions de dollars alors que la mission Apollo 11 a coûté 2 milliards, doit-on rétroactivement considérer que l’investissement des année 60 était une erreur et qu’en bon père de famille, il aurait fallu attendre le 21ème siècle pour entamer la conquête spatiale ? »

Il rappelle en outre que « les premiers tarifs solaires étaient conçus pour faire décoller une fusée incertaine. La technologie était naissance, les industriels “bricolaient” et nos projets ont connu un bon nombre de déboires technologiques inhérents aux balbutiements d’une filière. Oui, rétroactivement, ces premiers tarifs peuvent paraître aujourd’hui disproportionnés, mais à l’époque, les pionniers du solaires prenaient des risques que seule la perspective d’un gain important pouvait équilibrer l’intensité capitalistique requise il y a 10 ans, quand les panneaux coûtaient plus de 3€/W. Il est tellement facile de réinterpréter le passé quand on connaît la fin de l’histoire, mais c’est un tout autre exercice qui est demandé aux entrepreneurs quand ils doivent plonger dans l’inconnu. »

Et d’ajouter : « Doit-on également rappeler que le premier niveau de tarif proposé par la France en 2006 se voulait plus attractif que celui de son voisin d’outre-Rhin alors que nous disposons d’un gisement solaire presque 30% supérieur. La suite de l’histoire nous la connaissons tous, je parle pour ceux qui comme moi sont encore là pour la raconter. Ce fut l’emballement, la bulle de 2010 et le choc frontal avec le mur du moratoire. Après les centaines d’entreprises fermées et les milliers d’emplois perdus, veut-on aujourd’hui finir de purger la filière en tuant ceux qui ont survécu ? Je crains que cette économie de bouts de chandelle, gagnée sur la CSPE, ne compense pas les coûts induits sur le financement futur de la croissance verte que la place financière ne manquera pas de refacturer. Et c’est sans prendre la mesure des conséquences économiques sur les acteurs indépendants qui ont financé la croissance de leurs entreprises grâce au succès de leurs projets solaires et qui pourraient mettre la clé sous la porte. »

Pour conclure, Xavier Daval, demande : « De grâce Monsieur le Président, dites à votre gouvernement qu’au moment où la France est sous le choc économique terrible du Covid-19, alors que les filières des ENR sont parmi les rares secteurs en croissance de notre pays, nous n’avons pas besoin d’une crise financière dont les répercussions seraient bien plus larges que le seul périmètre des petits projets solaires historiques. »

Sollicitée par nos soins, Aurélie Beauvais, directrice stratégie du lobby européen SolarPower Europe, indique, de son côté : « Si les rapports de la révision rétroactive s’avèrent corrects, ce serait un pas dans la mauvaise direction pour atteindre les objectifs climatiques du Green Deal européen. Les changements rétroactifs ont historiquement sapé la confiance des investisseurs et des consommateurs dans l’énergie solaire et sont maintenant interdits dans la directive du paquet “énergie propre” de l’UE. »

Et d’ajouter : « Pour réaliser le “Green Deal” et une relance verte, nous devons accroître le déploiement de l’énergie solaire, qui créera de nouveaux emplois et de la croissance pour l’UE. Tout changement rétroactif susceptible de nuire à la certitude et à la stabilité de notre secteur est contre-productif par rapport à l’objectif de neutralité climatique de la Commission d’ici 2050. »

Et de conclure : « Bien que les détails de la révision rétroactive proposée restent à confirmer, il est essentiel qu’une telle révision n’entrave pas les projets solaires à un moment où l’UE a besoin d’un rythme de déploiement solaire beaucoup plus rapide ».

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