L’acteur de la semaine : les trois axes de développement de Corsica Sole

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« Il a toujours été dans l’ADN de Corsica Sole de favoriser l’installation de centrales photovoltaïques sur friches dégradées, pour éviter les conflits d’usage », assure Thomas Muller, directeur du développement de l’entreprise, dans une interview avec pv magazine France. C’est donc sur ce type de terrains que la société née en Corse en 2009 installe jusqu’à présent la majorité de ses actifs. Ainsi, la ferme solaire de 5,5 MWc du Moulin de Beuvry, inaugurée en mai dernier sur la commune de Labourse dans le Pas-de-Calais, valorise une friche industrielle sur laquelle une ancienne centrale thermique avait été démantelée dans les années 1980. Une autre centrale photovoltaïque est également en cours de développement dans les Alpes-de-Haute-Provence, sur un foncier Seveso inutilisé appartenant au chimiste Arkema. Dans le Loiret, l’entreprise devrait prochainement construire une centrale solaire en deux tranches sur la commune de Pithiviers, pour atteindre une puissance de 12 MWc.

Le solaire sur foncier constructible

« Pour autant, il est certain que ces terrains dégradés ne suffiront pas pour atteindre les objectifs de la France en termes de développement solaire, tempère Thomas Muller. Nous devons aussi nous orienter vers d’autres types de foncier ». C’est le cas par exemple de la centrale de Saint-Quentin-Du-Dropt, dans le Lot-et-Garonne, constituée de deux parcs pour une puissance totale de 6,5 MWc et une production d’environ 8 000 MWh par an. Elle a été implantée sur un emplacement constructible jusque-là non valorisé, que Corsica Sole a souhaité valoriser, avec la mairie, tout en mettant en place un usage agro-pastoral. L’espace est donc mis à la disposition d’un agriculteur local et de son troupeau de moutons, qui permet de garantir un entretien naturel de la végétation. « Sur ces fonciers, qui n’accueillent pourtant pas d’activité économique, de nombreuses collectivités hésitent et préfèrent attendre l’implantation d’une entreprise dans le futur, relate Thomas Muller. Il est donc primordial d’être dans le dialogue avec les élus et la population et d’envisager, en plus de la production d’énergie, de la co-activité, pour valoriser au mieux l’espace ».

La centrale solaire de Picarreau (Jura), de 27 MWc, où une activité pastorale abandonnée au début des années 2 000 a été relancée.

Image : Corsica Sole

Pour massifier les volumes, Corsica axe en outre sa recherche de foncier vers les milieux naturelles et agricoles, avec une doctrine : choisir des sols non boisés pour éviter de déforester. « Concernant les terres agricoles, nous privilégions les parcelles qui ne sont plus exploitées ou qui présentent une valeur agronomique modeste, détaille Thomas Muller. En effet, pour atteindre les objectifs photovoltaïques français en 2028, nous n’aurions besoin de couvrir que 1 à 2 % de toutes les surfaces agricoles françaises de panneaux solaires. De fait, nous défendons plutôt l’utilisation des prairies pour y installer des activités de pâturage car les études ont montré un réel intérêt en termes de qualité du fourrage et d’enrichissement de la biodiversité.

Dernier en date, le parc photovoltaïque de Picarreau (Franche-Comté) de 27 MWc, porté par son maire et l’équipe municipale, vise à utiliser d’anciens pâturages, aujourd’hui en friches après l’arrêt de l’activité pastorale dans les années 2 000 et rendus à leur état d’origine par l’Office National des Forêts. Il accueille en outre des bergers des communes voisines. Inauguré en octobre 2022, le projet contribue donc à remettre le lieu en pâture extensive sans traitement et à en donner l’accès à des bergers locaux en charge de l’entretien du parc. « Sur un autre site, nous avons aussi un projet d’élevage de poneys, pour innover et nous adapter à l’économie propre à chaque région », complète Thomas Muller.

L’agrivoltaïsme à l’étude

Cela n’empêche toutefois pas Corsica Sole de débuter des expérimentations d’ombrières solaires sur du maraîchage ou des exploitations fruitières. « Compte-tenu du coût des systèmes agrivoltaïques dynamiques sur trackers, il faut des cultures agricoles à forte valeur ajoutée ou qui besoin de beaucoup d’ombrage et de protection contre les aléas climatiques, souligne le développeur. Car il existe encore de nombreuses inconnues sur la fiabilité technique et l’équilibre économique de tels systèmes ». C’est pourquoi la société travaille avec la coopérative ProVanille à la Réunion. La vanille a en effet besoin de 75 % d’ombrage et pour l’heure, les cultivateurs utilisent des filets, mais ces derniers ne les protègent pas des cyclones. Depuis 2016, l’entreprise développe donc des ombrières PV pour protéger les plants de vanille.

Centrale solaire du Moulin de Beuvry, sur la friche industrielle d’une centrale thermique démantelée.

Image : Corsica Sole

Au total, en additionnant tous ces types de fonciers (terrains dégradés, zones constructibles et sols agricoles), Corsica Sole dispose actuellement d’environ 700 MWc de projets solaires en développement (terrains sécurisés et études d’impact environnemental en cours), dont les chantiers pourraient être lancés à partir de 2025. Selon la stratégie de l’entreprise, une partie de l’électricité pourrait être vendue dans le cadre de contrats d’achat direct (PPA), tandis que l’autre partie resterait sous complément de rémunération (appels d’offres CRE). Par ailleurs, son portefeuille en négociation foncière dépasse les 2 GW, tandis qu’elle possède pour l’heure 100 MWc de capacité solaire installée, en France Métropolitaine, en Corse et dans les DOM-TOM.

Le stockage et l’hydrogène vert

Outre la production d’énergie photovoltaïque, Corsica Sole, en tant qu’expert dans les zones non interconnectées (ZNI), s’est aussi très tôt développée dans le stockage par batterie, pour des services d’équilibrage et de régulation du réseau. « Traditionnellement, ces services de régulation se font via les barrages hydroélectriques et des centrales thermiques au gaz, mais de plus en plus, les gestionnaires de réseau demandent des solutions décarbonées », contextualise Thomas Muller. La société a donc inauguré en décembre 2022 la plus grande batterie d’Europe continentale, à Deux-Acren en Belgique d’une capacité de 100 MWh. « Nous développons actuellement sur le sol français des projets équivalents, ainsi qu’en Estonie, en Pologne et en Suède, pour des mises en service espérées en 2025 », précise-t-il.

Enfin, Corsica Sole travaille sur le thème de l’hydrogène vert, dont les électrolyseurs seraient alimentés via ses centrales photovoltaïques. « Cet hydrogène vert aurait plusieurs applications, affirme Thomas Muller. Nous envisageons d’approvisionner un bateau de pêche expérimental en Corse. L’hydrogène permettrait aussi de remplacer une part du fioul utilisé par les centrales thermiques en Corse et en Outre-Mer, qui fonctionneraient alors avec un mix fioul-hydrogène vert ».

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